Amazon contre la classe ouvrière

Les mesures sanitaires actuelles entraînent une dépendance aux services comme ceux qu’offre Amazon. Rien d’étonnant si ses profits nets ont augmenté de 84% en 2020. Pointée du doigt pour ses conditions de travail exécrables, la compagnie étasunienne prétend «qu’il n’y a rien de plus important que la santé et la sécurité de ses employés». Cette affirmation sonne bien creux.

En cinq ans, 189 cas de tentatives de suicide ou de problèmes de santé mentale ont été rapportés chez Amazon aux États-Unis. Ces cas concernent 46 entrepôts du géant de la distribution situés dans 17 États différents. Le 1er mars 2021, on a appris qu’un employé de l’entrepôt de Las Vegas s’est suicidé sur son lieu de travail. Plus près de chez nous, dans l’entrepôt situé à Brampton près de Toronto, il a fallu plus 600 cas de COVID-19 pour que la santé publique décide de fermer l’entrepôt, malgré les protestations d’Amazon.

Des conditions de travail exécrables

Alors que le mouvement ouvrier québécois se bat contre une réforme des lois en santé et sécurité, force est de constater que lorsque les capitalistes mettent dans la balance le profit et la sécurité des employé·es, c’est toujours le profit qui l’emporte. Cadences infernales, impossibilité de prendre une pause à cause des distances à parcourir entre son poste de travail et la salle de pause, pas d’accès à des toilettes et surveillance sont le quotidien des travailleuses et travailleurs d’Amazon.

Ce n’est pas un hasard si la compagnie a choisi la ville de Bessemer, en Alabama, pour ouvrir un centre de distribution. Plus de 25% de la population de Bessemer vit sous le seuil de la pauvreté. Plus de 70% de la population est Afro-américaine et près du tiers de la population active est au chômage. 2% de la population de Bessemer a d’ailleurs trouvé un emploi dans l’entrepôt.

Amazon a en outre fait une campagne de séduction en offrant un salaire de 15$/h alors que le salaire minimum en Alabama est de 7,25$/h. Mais les conditions de travail sont effroyables. Les employé·es se sont donc organisé·es durant les derniers mois afin de se syndiquer.

Campagne de syndicalisation

Pour la classe ouvrière, la syndicalisation reste la seule méthode vraiment efficace pour se faire respecter par un employeur. La campagne de syndicalisation à Bessemer a été fort médiatisée en raison de son symbolisme. Réussir à syndiquer un entrepôt d’Amazon au cœur des États-Unis est de nature à motiver un mouvement de syndicalisation partout dans le monde. Malgré une bataille épique des travailleurs et travailleuses, Amazon a réussi à surpasser le nombre de votes en faveur d’un syndicat et à faire échouer la tentative.

Sans surprise, Amazon a sorti tout son arsenal anti-syndical et ses méthodes illégales. Les employé·es ont été soumis·es à des SMS, des publicités, des réunions obligatoires, allant jusqu’à mettre une fausse boîte aux lettres dans le stationnement de l’entrepôt pour récolter les bulletins de vote. 

Une lutte qui nous sert d’exemple

Amazon et son ex-patron, Jeff Bezos, sont des symboles de la nature parasitaire du capitalisme. L’entreprise est devenue si grosse et Bezos si riche qu’il ne semble plus y avoir de limites à leurs ambitions. Avec ses milliards, Bezos a tenté d’influencer les élections municipales à Seattle pour défaire Kshama Sawant, la candidate de Socialist Alternative. Malgré cela, Sawant a été réélue avec des scores encore plus importants qu’avant et a réussi à sécuriser la Taxe Amazon pour financer du logement abordable. 

En Allemagne et en Italie, les syndiqué·es d’Amazon ont fait la grève en mars de cette année. Les employé·es d’Amazon en Pologne, en solidarité avec ceux d’Allemagne alors en grève, ont ralenti la cadence. Cette solidarité nous montre qu’il est possible de résister à l’homme le plus riche du monde et de lutter pour de meilleures conditions de travail. La classe ouvrière a la force du nombre.

L’organisation syndicale

La journée de 8h a été une des revendications phares du mouvement ouvrier à la fin du XIXe siècle. En 1886, 340 000 travailleuses et travailleurs ont fait la grève et ont obtenu la journée de 8h. Chez Amazon, les quarts de travail de 10h sont monnaie courante. Maintenant qu’Amazon emploie plus d’un million de personnes autour du globe, la mobilisation et l’organisation syndicale sont essentielles pour faire face à ce géant. Les entrepôts allemands, italiens et polonais nous le démontrent sans équivoque.

Alors que de plus en plus de centres de distribution d’Amazon ouvrent leurs portes au Québec, la solidarité avec les employé·es d’Amazon ailleurs dans le monde prend toute son importance. Pour vraiment aider les travailleuses et travailleurs d’entrepôt, nous devons revendiquer la fin du régime de terreur qui existe dans les agences de placement. Ça passe forcément par la mise sur pied d’un syndicat qui représente démocratiquement les travailleuses et travailleurs dans le but de construire un rapport de force. 

Une campagne de syndicalisation internationale, basée sur les besoins réels des travailleuses et travailleurs, est nécessaire. Les leçons tirées de la campagne à Bessemer mettent en lumière la nécessité de mettre sur pied des comités d’organisation dirigés par des travailleurs et travailleuses de chaque service et de chaque équipe. Ces comités doivent être chargés d’organiser des discussions régulières sur les meilleures stratégies à déployer pour obtenir une reconnaissance syndicale. La force de ces structures pourra ensuite être mobilisée pour obtenir un premier contrat de travail. 

Amazon dépensera toujours plus d’argent que nous. Mais nous pouvons surpasser ses efforts grâce à notre nombre et à notre organisation. Un comité fort et démocratique composé de leaders capables de plonger dans la lutte tout le monde du milieu de travail peut faire toute la différence. Ce n’est qu’un début!


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