Fonderie Horne : stopper la pollution et garder les emplois!

La lutte contre les rejets abusifs d’arsenic dans l’air par la Fonderie Horne mobilise la communauté de Rouyn-Noranda depuis plusieurs années. Elle place la santé des gens et le respect de l’environnement au cœur de son action. Ce conflit expose l’opposition entre les intérêts des personnes qui habitent la ville et ceux de la Fonderie, défendus par le gouvernement de la CAQ.

Capitalisme et nationalisme caquiste : une impasse à un problème urgent

Après quatre ans de gouvernement caquiste, son bilan est marqué par un nationalisme identitaire et des attaques contre les travailleuses et travailleurs. La gestion du dossier Horne s’ajoute à cela.

Pendant que des gens de Rouyn-Noranda sonnent l’alarme, le gouvernement joue à la négociation. Ce même gouvernement qui se dit nationaliste pour le peuple ne semble pas tant s’inquiéter lorsqu’il s’agit de la santé des Québécoises et des Québécois de Rouyn-Noranda. Le nationalisme de François Legault s’est arrêté à la porte de l’entreprise Horne. Le gouvernement ne lui demande que de se conformer (éventuellement) aux normes établies par la loi québécoise sur l’environnement.

Pendant ce temps, les citoyens et citoyennes de Rouyn-Noranda intensifient leurs actions pour le respect des strictes normes d’émission d’arsenic dans l’air (3 ng/m3): assemblée publique, mobilisation au conseil municipal, rencontre et manifestation le 23 septembre.

Legault compte sur la volonté de l’entreprise à se «moraliser» et à proposer des plans de réduction d’émissions nocives et polluantes (23 contaminants). Ainsi, la Fonderie a cinq ans pour n’atteindre que l’objectif de 15 ng/m3 d’arsenic dans l’air, alors que la norme en vigueur est désormais 3 ng/m3! Malgré une promesse d’investissement de 500 millions de dollars de la compagnie, le gouvernement risque d’utiliser nos impôts pour lui venir en aide! Pourtant, la compagnie Glencore qui possède la Fonderie Horne a enregistré un profit de 19 milliards de dollars pour son premier trimestre de 2022. En 2021, elle a enregistré des revenus bruts de 203 milliards de dollars américains. De l’argent, elle en a! Mais elle a surtout un historique controversé.

Fonderie Horne : une vieille histoire

C’est en 1927 qu’Edmund Horne fonde son usine sur l’emplacement de la mine Noranda dans l’actuelle Abitibi-Témiscamingue. Si la compagnie a su prospérer, elle est aussi un sujet d’inquiétude depuis longtemps. Dans les années 1930 et 1940, les syndicats s’implantent dans la région notamment à Horne2. Les communistes sont à la tête d’âpres grèves souvent illégales pour la reconnaissance des syndicats nouvellement formés.

Dans les années 1980, Rouyn-Noranda s’est mobilisée pour que la Fonderie cesse de rejeter du soufre dans l’air! En 1989, malgré l’opposition de la part de la Fonderie Horne, les citoyennes et citoyens ont eu gain de cause. Le bras a été tordu et l’entreprise a dû se doter d’une usine d’acide sulfurique.

En plus, le début des années 2000 a été marqué par une grève des employé·es qui a duré presque un an. La Fonderie a également été pointée du doigt dans le dossier de la bérylliose contractée par des travailleurs et travailleuses. De plus, Glencore vient tout juste d’être condamnée à payer plus d’un milliard de dollars américains aux États-Unis suite à sept chefs d’accusation de corruption au Royaume-Uni en rapport avec ses opérations pétrolières en Afrique.

En 2021, l’Abitibi-Témiscamingue a reçu 81 avis de non-conformité à la Loi sur l’environnement. La Fonderie est l’une des responsables. Le gouvernement a-t-il besoin de preuves supplémentaires pour conclure qu’il y a un sérieux problème avec cette entreprise? Il est récurrent que des familles pensent au déménagement. Mais des gens souhaitent lutter!

La CAQ est incapable de répondre aux inquiétudes et aux besoins des gens. En 2019, la CAQ a été complaisante en soutenant Uber contre les chauffeurs de taxis, puis le patronat dans son lock-out contres les travailleurs et travailleuses de l’alumineire ABI. La gouvernance de la CAQ règle les conflits de travail ou les problèmes de santé publique au profit d’une seule classe, celle des capitalistes. C’est une gestion basée sur une propriété privée intouchable et la quête du profit à tout prix (peu importe les dommages). Dans la vision capitaliste, il n’y a que l’entreprise qui crée de la valeur et de la richesse…pas les salarié⋅es.

Au cœur de ces problématiques, c’est le capitalisme qui se dévoile. La CAQ parle de défendre les intérêts nationaux en laissant les compagnies faire ce qu’elles veulent. La raison: «sauver» les emplois. Mais il est d’abord question des intérêts des capitalistes, pas de ceux des travailleuses et des travailleurs. L’on ne devrait pas avoir à choisir entre la santé, l’environnement ou la «garantie» d’emplois.

Ce dossier nous appelle à changer de système de développement économique. Nous devons nationaliser cette entreprise sous contrôle démocratique. De cette manière, nous pourrons réellement préserver les emplois et adapter la Fonderie, voire la reconvertir à d’autres fins pour accomplir une transition écologique juste.

Pour la mobilisation!

Pour le patronat, les élites politiques et certaines directions syndicales, contraindre une grande compagnie à obéir aux lois environnementales pourrait causer son départ et faire perdre des emplois puis des redevances. Ce faux argument cause une peur légitime aux personnes travailleuses puis aux villes et régions. C’est que le Capital nous impose sa domination et ses logiques propres. Il faut opposer à cette mauvaise gestion une planification rationnelle, démocratique et socialiste.

C’est pourquoi il faut lutter pour la nationalisation sous contrôle démocratique des secteurs clés et des grandes entreprises polluantes. Cette forme de nationalisation permettrait aux salarié⋅es de gérer les usines et leurs conditions de travail. Cela permettrait de rendre sains et sécuritaires les lieux de travail selon les besoins et réalités des gens y travaillant. La nationalisation est aussi le meilleur outil stratégique pour une transition économique juste et écologique.

Elle serait aussi un atout dans la planification de la main-d’œuvre et des ressources régionales. Dans l’état actuel des choses, des régions dépendent des entreprises privées pour procurer des emplois. Une planification publique et démocratique, c’est l’inverse de cette dépendance!

Toutefois, le gouvernement de la CAQ ne fera pas ce pas en avant. Il fera tout pour préserver la propriété capitaliste. Seule la force du nombre peut faire plier un gouvernement et une grande entreprise! Nous avons vu qu’en 1989, la mobilisation a porté fruit. Quand on lutte résolument, on gagne!

Les nationalisations, comme n’importe quels gains sociaux, ne peuvent être acquises que par les luttes acharnées des gens ordinaires. Ultimement, c’est à la majorité de la classe ouvrière à s’organiser politiquement pour prendre le pouvoir dans les villes, à Québec et à Ottawa. C’est la seule manière de défendre ses intérêts et ses besoins réels fondamentaux.

Pour cela, nous militons en faveur de la création d’un parti socialiste de masse de la classe ouvrière et de la jeunesse. Devant les partis des capitalistes, il faut opposer le parti de la classe ouvrière. Il faut ôter les leviers politiques et économiques des mains des élites. Il n’y a que dans une société socialiste que nous pouvons inscrire nos conquêtes, nos gains et nos droits dans le temps et l’Histoire!

J’entends la fonderie qui rush, pour ceux qui le savent pas
On y brûle la roche, et des tonnes de bons gars
(…) Entendez-vous la rumeur, la loi d’la compagnie
Il faudra que tu meures si tu veux vivre mon ami

Et j’ai couché dans mon char de Richard Desjardins


1 Mentionnons la grève de 1934 dite des «Fros», dirigée par la Mine Workers League of Canada. La mine Horne employait beaucoup d’ouvrier immigrants, dits «foreigners» ou «fros». Cette grève a été réprimée en dix jours et reste dans la mémoire de la ville de Rouyn-Noranda..


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