La solidarité pour stopper le massacre à Gaza!

Action du syndicat des transport italien USB au port de Gênes en novembre 2023. Photo: USB

Nous entrons dans une nouvelle phase du conflit israélo-palestinien, une phase plus barbare que jamais. Malgré cela, de nouvelles opportunités de construction d’un mouvement anti-guerre démocratique se présentent. Comment se battre pour la libération du peuple palestinien? Comment notre solidarité peut-elle changer la donne?

Début d’une nouvelle période historique 

Les attaques du mouvement islamiste et nationaliste palestinien Hamas le 7 octobre dernier représentent sa plus grande offensive armée contre Israël. En réponse, l’État israélien a déclenché une terreur qui a fait un nombre record de morts dans la bande de Gaza. Ce nombre dépasse maintenant 12 000 personnes, dont près de la moitié sont des enfants.

L’intensité des attaques du Hamas constitue un tournant stratégique dans la politique du mouvement. Ce dernier répond à de nouveaux besoins géopolitiques. Quant à elle, la réplique complètement sauvage d’Israël indique que le gouvernement ultranationaliste de Benyamin Nétanyahou est à court d’options. Il est prêt à risquer la stabilité de toute la région pour maintenir ses intérêts. Ces tournants radicaux contrastent avec la tendance de la période précédente.

L’État capitaliste d’Israël, source de sa propre insécurité

Lors de son élection en 2009, le premier ministre Nétanyahou s’engageait déjà à faire la guerre pour «résoudre» la question de la sécurité israélienne. Sa politique ininterrompue d’oppression nationale sanglante du peuple palestinien n’a fait qu’alimenter la haine et l’extrémisme actuel. L’actuel ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, parle désormais de «briser le cou» au Hamas. À ceux qui n’ont qu’un marteau, tout ressemble à un clou.

La réponse extrêmement brutale d’Israël dans la bande de Gaza trouve sa source dans la nécessité de poursuivre coûte que coûte la colonisation des territoires palestiniens et de maintenir l’apartheid anti-palestinien en Israël. Cette oppression est nécessaire pour les capitalistes d’Israël et de la région. Elle garantit leurs profits, notamment ceux tirés de l’industrie militaire et du secteur de la construction. Le partenaire principal d’Israël dans cette aventure barbare est les États-Unis.

Une «normalisation» interrompue

Depuis quelques années, les États-Unis poussent un processus de «normalisation» des relations économiques entre Israël et certains pays arabes de la région, notamment l’Arabie Saoudite. Dans un monde où les simples accords de libre-échange économiques ne sont plus en mesure de garantir les profits, ces États obéissent à des règles qui ne leur offrent plus beaucoup de marge de manœuvre pour régler les conflits sociaux. 

Le choix principal qui s’offre aux classes dirigeantes consiste à accentuer l’exploitation et l’oppression en utilisant la violence armée pour satisfaire les intérêts des propriétaires, éliminer la compétition, exploiter au plus bas prix et sécuriser des marchés.

Le bateau de la Palestine sur la rivière géopolitique

Le Hamas est financé et armé par l’Iran et le Hezbollah libanais. Ces forces s’opposent à toute influence américaine et prônent la destruction d’Israël. Le processus de «normalisation» entre Israël et certains pays arabes a pour effet de balayer sous le tapis le soutien historique de ces pays à la défense de l’autodétermination du peuple palestinien. L’intensité des attaques du Hamas a réussi – du moins temporairement – à freiner la «normalisation» entre Israël et l’Arabie saoudite ainsi que le Maroc. Même l’ouverture du bureau économique québécois à Tel-Aviv a été retardée.

Au niveau mondial, le Hamas se retrouve dans l’axe Iran-Russie-Chine, en opposition au bloc OTAN-États-Unis-Israël. La Chine n’a toujours pas condamné les attaques du Hamas et les dirigeants du Hamas ont été accueillis à Moscou à la fin octobre.

Les impérialistes ne peuvent défendre les droits nationaux

Comme à l’époque de la Guerre froide, Moscou et Pékin tentent cyniquement d’instrumentaliser la résistance palestinienne. La libération de la Palestine ne se réalisera jamais à travers la défense des intérêts impérialistes de la Chine, de la Russie ou de toutes autres élites capitalistes en Palestine. Ces élites ne veulent pas plus se battre pour les droits nationaux palestiniens au Moyen-Orient que pour ceux du peuple tibétain, ouïgour ou ukrainien chez elles. 

Le Hamas n’est pas l’allié des classes ouvrières et pauvres de Palestine. Il s’agit d’un parti d’austérité ultraconservateur religieux et misogyne. Il bénéficie toutefois d’un soutien parmi la population palestinienne, en partie grâce aux services d’aide directe qu’il gère (hôpitaux, comptoirs alimentaires). Mais surtout parce qu’il représente la seule force de résistance palestinienne déterminée suite au discrédit du Fatah, soumis à Israël, et présentement aux commandes de l’Autorité palestinienne. 

Comme ses équivalents en Égypte ou en Tunisie – les Frères musulmans – le Hamas a pu fleurir durant des troubles sociaux intenses marqués par l’absence d’une organisation politique défendant les intérêts de tous les travailleurs et travailleuses de la région.

Le Hamas a choisi de tuer des civils en Israël, car il n’a rien à faire de la solidarité entre les classes ouvrières de Palestine et d’Israël. Nous condamnons les attaques du Hamas contre la classe ouvrière israélienne. De son côté, le gouvernement d’Israël fait dix fois pire en pilonnant des hôpitaux et des écoles, en bloquant les frontières, en coupant l’accès aux sources d’énergies ou de télécommunications. Tout cela prend l’allure d’un génocide.

Le potentiel de notre solidarité

L’une des conséquences de cette souffrance est le niveau historique de solidarité avec Gaza. Des millions de personnes se mobilisent et se politisent sur la planète. Voilà un potentiel incroyable pour activer l’organisation et la politisation de la classe ouvrière en faveur de la paix pour toutes les communautés nationales, pour la libération de la Palestine et un changement socialiste de la région.

En Égypte, le régime policier d’al-Sissi a été contraint d’autoriser les premières manifestations nationales depuis dix ans. Des centaines de milliers de personnes ont défilé à Rabat, au Maroc, lors de la plus grande manifestation depuis 20 ans. Les protestataires ont aussi défié la loi pour marcher dans les rues de Paris, de Londres et de Berlin.

De nombreux syndicats ont répondu à l’appel des syndicats palestiniens pour stopper toute complicité dans le transport et la fabrication d’armes destinées à Israël. Dans plusieurs pays, les dockers ont paralysé les cargaisons d’armement destinées à Israël.

Au Canada et au Québec aussi, des manifestations de dizaines de milliers de personnes se produisent semaine après semaine depuis le début du conflit. À Toronto, plus d’une centaine de personnes ont bloqué l’entrée d’un fournisseur militaire d’Israël, INKAS. Ces actions directes ou massives montrent que la lutte de la classe ouvrière peut elle aussi décider du cours de l’histoire.

Organiser un mouvement de grève de masse à l’échelle internationale

Les jeunes ainsi que les travailleurs et les travailleuses du monde entier ont un rôle actif à jouer pour stopper la guerre. La participation aux manifestations de masse est une première étape pour montrer l’ampleur de la solidarité avec Gaza, même si les médias l’ignorent ou la minimisent.

Les actions directes, les débrayages étudiants et l’action des comités de solidarité peuvent servir d’appel à l’action pour l’ensemble du mouvement ouvrier. Les syndicats ont un rôle central à jouer pour organiser des actions de grève et de perturbation contre le massacre à Gaza.   

Au Québec, les syndicats peuvent suivre l’exemple du Conseil central Montréal métropolitain – CSN (CCMM-CSN) et prendre position en faveur de l’autodétermination du peuple palestinien. Cet appui est encore très faible. Pour le rétablir, le meilleur moyen est encore que le mouvement syndical québécois se réapproprie sa propre lutte de libération nationale et la solidarise de celle en Palestine. C’est cette solidarité qui a porté le mouvement syndical à la tête du mouvement propalestinien des années 1970, notamment grâce au comité Québec-Palestine du CCMM-CSN, alors que Michel Chartrand en est le président.

Que ce soit en Palestine, en Israël ou ici même, les élites qui font la guerre et l’alimentent ne plieront que sous le poids de mouvements de masse animés par des grèves coordonnées. C’est ce type de pression qui a porté le mouvement de la première Intifada (1987-1993) à forcer la signature des accords d’Oslo. Cet esprit de solidarité entre les classes ouvrières de Palestine et d’Israël a aussi contribué au succès des grèves de 2021.

Au Québec, le soutien actif des grévistes des services publics avec leurs collègues de Palestine peut aussi contribuer au mouvement contre la guerre. Vigiles, actions directes, formations et grèves peuvent être mises à l’ordre du jour. Mêmes possibilités du côté des associations étudiantes.

Sur cette base militante, nous pouvons développer la lutte politique pour défaire nos propres gouvernements afin que nos ressources cessent de financer la guerre, la militarisation et cessent de soutenir le régime israélien. Ces milliards de dollars doivent être investis dans les services publics, pas dans l’armement.


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