Rassemblement du SECHUM-CSN le 9 septembre à Montréal

Grand rassemblement syndical : Des augmentations justes pour tout le monde !

Plus de 500 travailleuses et travailleurs de la santé se sont relayés devant le CHUM, au coin des rues Sanguinet et René-Lévesque, le 9 septembre dernier pour réitérer la revendication principale de la CSN, soit des hausses salariales en montant fixe pour les employé·es du secteur public. Il s’agit du plus grand rassemblement du personnel de la santé a avoir été organisé jusqu’ici dans le cadre des négociations entre l’État québécois et les syndicats du secteur public.

De passage durant leur temps de pause, des centaines de travailleuses et de travailleurs du CHUM1 sont venus exprimer leur mécontentement quant à l’injustice dans le versement des primes COVID-19. Les personnes présentes étaient surtout très conscientes de la nécessité d’en arriver à un renouvellement de convention collective satisfaisant pour 2020-2025, contrairement aux échecs des derniers Fronts communs intersyndicaux du secteur public.

Pour retenir le personnel, hausser les salaires

Une préposée aux bénéficiaires a exprimé sa frustration à Alternative socialiste concernant sa situation salariale. « On donne toujours tout aux infirmières, lance-t-elle. On est toujours oubliées concernant les salaires. Notre pouvoir d’achat régresse. On en perd chaque année ». Une employée en radiologie nous a tenu un discours similaire. « C’est bien beau de donner des augmentations aux médecins, mais c’est irritant d’être oubliées, souligne-t-elle. Les patrons ont de la misère à retenir le personnel. Le CHUM est pourtant une belle place pour travailler ». Selon elle, l’amélioration des salaires comme élément central des conditions de travail est essentielle pour retenir les employé·es.

Même diagnostic du côté du département de comptabilité. « On se bat déjà pour passer à une catégorie salariale supérieure. On est en surcharge de travail parce qu’il n’y a pas assez de personnel », souligne un agent administratif.

Des travailleuses du département de toxicomanie nous ont expliqué que leur charge de travail a augmenté d’environ un tiers avec la pandémie de la COVID-19. La consommation d’alcool et de drogues a connu une hausse. « Les cliniques sont pleines », lance l’une des travailleuses. « La fermeture des organismes ressources et des refuges pour personnes itinérantes et le fait que plusieurs personnes n’ont pas de médecin de famille font que nous sommes devenues la première ligne d’intervention », s’exclame l’une d’elles.

Une revendication partagée… par des gestionnaires!

Plusieurs personnes nous ont même confié que certains gestionnaires soutiennent dans l’ombre l’action des syndicats. « Ils voient les mêmes problèmes que nous et les mêmes solutions que nous, explique un élu syndical. Mais ils ne peuvent pas nous appuyer publiquement, sinon ça serait déloyal envers leur employeur ».

Une solidarité à la base

« Dans cette négociation, nous réclamons au gouvernement Legault des augmentations en montant fixe pour reconnaître le travail important des bas salarié·es du réseau de la santé, a lancé Claude Talbot, le président du Syndicat des employé·es du CHUM (SECHUM-CSN). Les augmentations en pourcentage creusent les écarts salariaux entre les différents titres d’emploi. Elles représentent donc un montant bien plus important pour certains salarié·es que d’autres. Aujourd’hui, c’est assez ! Les bas salarié·es du réseau de la santé, les préposés aux bénéficiaires, d’hygiène et salubrité, à la stérilisation, aux services alimentaires, aux transports patients, les agentes administratives, les magasiniers, les assistants techniques senior en pharmacie et plusieurs autres, sont tout aussi essentiels pour le fonctionnement du réseau et il est temps de les reconnaître! ».

Des personnes déléguées du syndicat du CIUSSS2 du Centre-Sud, du CIUSSS de l’est-de-l’Île-de-Montréal, du CHU Sainte-Justine, du CUSM3 et du CCMM4 sont venues ajouter leur voix à celles des syndiqué·es du SECHUM en faveur de cette revendication. Jusqu’ici, le rassemblement du 9 septembre représente la plus grande action syndicale dans le cadre des négociations 2020 dans le secteur public.

Une revendication à défendre

La défense des hausses salariales en montant fixe – indexées au coût de la vie – y est pour quelque chose. Elle est au coeur de l’action du SECHUM depuis les deux dernières années. Le syndicat local s’est battu pour faire adopter cette revendication à la FSSS puis à la CSN l’an dernier. Les membres d’Alternative socialiste ont joué un rôle moteur dans la défense de cette demande dans différents syndicats, à toutes les étapes des discussions préparatoires aux négociations du secteur public 2020.

Or, la CSN a reculé sur cette position lors de la déclaration de l’état d’urgence sanitaire à la mi-mars, soit avant même le début des négociations officielles avec Québec. Cette situation a créé beaucoup de mécontentement dans la base syndiquée. Durant les instances d’été, le SECHUM et d’autres syndicats locaux ont réussi à convaincre plusieurs organisations syndicales locales de maintenir l’orientation des montants fixes. Ils ont aussi défendu le fait que ces montants doivent être les plus hauts possible.

Pour Simon Bouclin du Syndicat national des employé·es du CHU Sainte-Justine (CSN), les syndicats locaux doivent maintenir la pression, ensemble, pour que leurs revendications décidées démocratiquement continuent d’être défendues par leur propre centrale syndicale.

Un cuisinier du CHUM explique que les « hausses » de salaire en pourcentage obtenues lors des deux derniers fronts communs intersyndicaux (2015, 2010) n’ont rien représenté de substantiel pour la vaste majorité des employé·es du public. « Elles n’ont pas couvert l’inflation. On s’est appauvri. Ces « hausses » ont démobilisé les membres, soutient-il. Il y a beaucoup d’ouvrage à faire pour former une relève syndicale militante ».

Le défi de la solidarité

Face à l’intransigeance du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ), plusieurs craignent une loi spéciale qui fixerait unilatéralement les conditions de travail pour les 5 prochaines années. L’extension possible cet automne de l’état d’urgence sanitaire – grâce auquel le gouvernement décide de tout par décret – laisse aussi présager le pire. Dans le contexte actuel, « il faut profiter de l’ouverture pour mobiliser nos membres et la population », estime Alexandre Clavel du Syndicat des travailleurs et travailleuses du CIUSSS Centre-Sud de Montréal (CSN).

Le cuisinier du CHUM rappelle qu’« il y a 20 ans, on sortait dehors pour nos derniers débrayages illégaux ». « Lorsque le débrayage touchait un département, d’autres sortaient en solidarité, mentionne-t-il en saluant les gars des métiers qui depuis ont vu leur département être privatisé. Il y a tout un défi de solidarité ». Le cuisinier mentionne l’enjeu de la mobilisation des jeunes et des nouveaux arrivants. « Il faut regarder ce qui nous rassemble », lance-t-il. Bien qu’il a voté pour la CAQ, il considère que le gouvernement est arrogant et ne traite pas ses collègues comme des travailleuses et des travailleurs essentiels.

Un gouvernement à faire tomber

L’offre salariale actuelle de la CAQ est la même que celle annoncée en décembre 2019, soit +5% sur 3 ans. En vue de la 2e vague, le premier ministre propose comme solution d’ajouter des gestionnaires et de les rendre « imputables ». Bref, rien pour améliorer durablement la situation des services publics et des gens qui y travaillent.

Plusieurs personnes rencontrées au rassemblement du 9 septembre signalent qu’il est urgent d’en finir avec le gouvernement de François Legault. Le Québec fait figure de dernier de classe au Canada pour sa gestion catastrophique de la pandémie, l’une des pires au monde. Le manque de ressources et la mauvaise gestion du secteur de la santé et des services sociaux, en particulier pour les résidences pour personnes âgées, sont la cause directe de l’hécatombe québécoise. La direction de Québec solidaire a d’ailleurs été vertement critiquée pour sa complaisance envers la CAQ durant la première vague de la COVID-19.

Une chose est toutefois sûre. Les travailleurs et les travailleuses de la santé bénéficient d’un fort appui parmi la population. Si, durant les prochaines années, le mouvement syndical est en mesure de construire une solidarité et un esprit de corps militant entre ses membres et la population, la volonté d’aller jusqu’au bout pour améliorer ensemble nos services publics pourrait faire tomber Legault. Une telle situation poserait clairement la question du type de gouvernement nécessaire pour répondre aux besoins des travailleuses et travailleurs du Québec.

C’est pour cette raison qu’Alternative socialiste fait circuler une pétition concernant la taxation et l’imposition des riches afin de financier les services publics. Cette revendication est très bien reçue par les travailleuses et travailleurs de la santé. Elle pourrait connaître un rayonnement encore plus grand en étant reprise par les syndicats ou Québec solidaire.

Cette pétition souligne le fait que les grandes compagnies capitalistes sont incapables de répondre à nos besoins, même les plus élémentaires. Pour y parvenir, l’économie et sa production doivent être planifiées démocratiquement par un gouvernement où seule la voix de ceux et celles qui créent réellement la richesse – les travailleurs et les travailleuses – compte.


1 Centre hospitalier de l’Université de Montréal

2 Centre intégré de santé et de services sociaux

3 Centre universitaire de santé McGill

4 Conseil central Montréal métropolitain


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