Travailler jusqu’à la mort? Hors de question!

Photo : G.Garitan (Wikipedia)

Comme annoncé lors de la campagne présidentielle, le gouvernement Macron a lancé sa réforme des retraites. Au programme notamment : passage de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans, et nombre d’annuités de 41 à 43. Plus de 70% de la population est opposée à cette réforme qui vise à faire travailler tout le monde plus longtemps.

On connaît désormais la rengaine : nous vivons plus longtemps, alors il faudra travailler plus longtemps. Peu importe si, à 64 ans, 29% des 5% de travailleurs et travailleuses les plus pauvres sont déjà morts et ne bénéficieront donc jamais du système de retraite pour lequel ils ont cotisé toute leur vie. Il est également inenvisageable de refinancer ce système avec plus d’argent public, qui manque. Les impôts sur les bénéfices des entreprises sont en effet passés de 33,3% en 2017 à 25% en 2022.

Le gouvernement tente de faire passer la pilule de la réforme des retraites avec des mesures prétendument progressistes, comme le passage de la retraite minimum de 900 à 1200 euros. Mediapart a calculé que seules 48 personnes pouvaient aujourd’hui répondre aux conditions imposées pour y avoir droit!

Les femmes aujourd’hui touchent déjà en moyenne 40% de retraite en moins et le recul de l’âge de départ à 64 ans annulera pour nombre d’entre elles les années gagnées suite à la naissance d’enfants. Tout le monde le sait : attaquer l’indépendance économique des femmes revient à accroître le danger d’en enfermer dans des relations violentes. De meilleurs salaires et pensions : c’est en s’en prenant à la violence économique que l’on commence à s’en prendre sérieusement aux violences sexistes!

Image : Allan BARTE. http://www.allanbarte.com/

Cette réforme arrive dans un moment où la situation est déjà particulièrement dramatique avec l’actuelle flambée des prix. Mais de l’argent, il y en a! D’une part, les entreprises du CAC 40 ont rendu à leurs actionnaires 80,1 milliards d’euros en 2022, un record! Ensuite, les 42 milliardaires français se partagent un patrimoine de 544 milliards d’euros, l’équivalent de toute la richesse produite en un an en Belgique. Encore un record. Enfin, le plus gros poste de dépenses de l’Etat, ce sont les aides publiques à destination des entreprises : 157 milliards d’euros par an.

Le front commun des 8 principales organisations syndicales du pays (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires) est important. Ce n’était plus arrivé depuis 2010 (quand l’âge de la retraite est passé de 60 à 62 ans sous Sarkozy). Fin 2019, début 2020, une autre attaque contre les retraites avait donné lieu à une lutte titanesque, mais le manque de plan d’action audacieux vers une grève générale reconductible avait donné lieu à un essoufflement du mouvement. Comme l’a récemment fait remarquer un syndicaliste CGT (Confédération générale du travail) dans les pages de Libération : «sans le confinement, en 2019, ça n’aurait pas marché».

Leçons de la lutte pour le pouvoir d’achat

Le mouvement de grève dans les raffineries en automne dernier avait alimenté la confiance dans d’autres secteurs. À la mi-septembre encore, il était impossible d’imaginer que quelques semaines plus tard, un début de lutte généralisée se produirait ; qu’un tel type de mouvement de grève dynamique se développerait.

Deux journées de grèves nationales avaient été appelées pour la fin du mois de septembre par la CGT et Solidaires, mais sans être des échecs complets, elles étaient loin de ce qui était nécessaire pour mener une bataille pour gagner. Ces journées de grève n’avaient été organisées qu’à contrecœur, en réponse aux appels de Mélenchon et de la France Insoumise qui relayaient la colère à la base et poussaient pour un mouvement social en septembre.

Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez avait déjà montré en juin son manque de volonté de construire un mouvement généralisé : « Les mobilisations sociales sont de la responsabilité des syndicats », avait-il répondu aux appels de Mélenchon. Celui-ci avait également tenté, sans succès, de mobiliser les forces syndicales pour la « Marche contre la vie chère et l’inaction climatique » du 16 octobre, qui a finalement été un grand succès en rassemblant plus de 100 000 personnes à Paris. La mobilisation pour cette marche s’annonçait pourtant très difficile, vu le contexte de luttes plus restreint, mais aussi à cause des critiques justes à l’encontre de la gestion désastreuse et sexiste de l’affaire Quatennens par Mélenchon et la direction de la FI.

Mais le nouveau contexte de début de généralisation des grèves avait boosté la mobilisation. Cela tombait à point à la fois pour laisser s’exprimer la colère et pour regarder le camp d’en face enfin à nouveau avec détermination.

La direction de la CGT n’avait pas l’intention d’évoluer vers un mouvement de grève généralisé. C’est la colère croissante de la base, à l’origine des actions de grève, qui a poussé les directions syndicales à aller plus loin que ce qu’elles avaient initialement prévu.

Sans cette puissante grève dans les raffineries, l’accord obtenu – même faible – n’aurait jamais vu le jour. C’est aussi ce nouveau contexte bouillonnant qui a obligé Macron à repousser le lancement de sa réforme des retraites au début d’année de cette année. Comme d’autres avant, ce mouvement a confirmé que seule la lutte paie, grâce à l’arme de la grève et autour de revendications offensives.

Utiliser sérieusement l’arme de la grève

Aujourd’hui, il faut dépasser la simple suite de dates de journées de grèves et de mobilisation vaguement liées entre elles si on veut éviter que le mouvement finisse par s’essouffler sans victoire, ce sur quoi compte le gouvernement. Il est urgent d’organiser des assemblées de lutte sur les lieux de travail ouvertes à tous et toutes les collègues, syndiqué·es ou non, et d’organiser de pareils comités dans les lycées, les universités et les quartiers pour construire la grève générale reconductible. C’est ainsi que l’on pourra repousser toute la réforme des retraites, mais aussi faire chuter le gouvernement Borne et toute la politique d’austérité.

L’organisation à la base est clé pour éviter que la lutte ne soit à un moment trahie par le sommet syndical. La grève des contrôleurs de la SNCF pendant les fêtes avait montré la voie, en s’organisant au travers d’une page Facebook « collectif national ASCT » (Agents, service commercial, trains) pour passer à l’action et imposer aux directions syndicales le dépôt du préavis. De même, pendant la grève des raffineries (en septembre et octobre 2022), les ouvriers de Total avaient à nouveau mené une grève reconductible, dont la reconduite était assurée par un vote démocratique. C’est avec ce genre de méthode qu’on assure l’implication de l’ensemble des travailleurs et travailleuses et donc la réussite du combat. La faiblesse de ce mouvement avait alors été son isolement (malgré un large soutien passif), qui avait permis aux autorités de dégainer la réquisition de personnel. Cela ne fait que souligner la nécessité de construire un mouvement large reposant sur l’implication maximale de l’ensemble de la classe travailleuse.

L’extrême droite n’ose pas s’opposer frontalement au mouvement. Ce type de mouvement reposant sur la lutte de classe est le cauchemar de Le Pen & Co car cela démasque l’hypocrisie de leur opposition à ce type de réformes. Leur monde, c’est le même que celui des amis de Macron, avec en plus la volonté d’écraser physiquement tout le mouvement social et d’imposer le racisme comme pensée unique à coups de bottes. Le mouvement ouvrier en action est le meilleur remède contre les divisions semées au sein de la classe travailleuse, car l’unité est nécessaire pour vaincre.

Construire une riposte internationale de masse

Les mouvements de grève ont besoin d’être coordonnés au niveau international. Fin septembre, la lutte du personnel des raffineries a reçu la solidarité de plusieurs syndicats en Europe. Des luttes syndicales importantes se développent en ce moment-même dans des pays limitrophes. L’automne dernier, la Grande-Bretagne a vécu son plus grand mouvement de grèves depuis des décennies – un mouvement qui est de retour maintenant en janvier, et qui s’annonce explosif. La Belgique vit aussi au rythme d’actions de grèves dans différents secteurs depuis plusieurs mois, qui ont culminé en une grève générale de 24 heures le 9 novembre.

Une approche internationaliste devrait faire partie de chaque mouvement de luttes. Pourquoi ne pas appeler à l’organisation d’une journée de grève générale européenne?

Pour une société socialiste démocratique

Une planification économique démocratique générale de la société est urgente : orienter la production vers ce qui est nécessaire, vers les besoins réels de l’immense majorité de la population et ceux de notre planète.

Il faut discuter et avancer vers un autre type de système économique, vers une société débarrassée de l’exploitation et de la loi du profit : une société socialiste démocratique. C’est la seule capable d’assurer qu’une poignée d’ultra-riches ne décide de tout en fonction de ses intérêts. C’est la seule capable d’assurer l’existence harmonieuse des êtres humains et de leur environnement.

Dans cette lutte pour s’approprier les moyens, appliquer un tel programme, et aller vers un changement sociétal, c’est la classe ouvrière organisée qui peut jouer le rôle moteur et entraîner avec elle en front uni le mouvement pour le climat, le mouvement féministe et d’autres mouvements sociaux. Les bases du renversement du système capitaliste seraient ainsi posées.

Rejoignez Alternative Socialiste Internationale!

Nous pensons que la bataille contre le système et pour une alternative sociétale doit se mener à l’échelle la plus large, et c’est pourquoi nous sommes présents dans plus de 30 pays sur tous les continents : en Europe bien sûr, mais aussi par exemple au Brésil, au Chili, au Mexique, aux USA, au Québec, au Nigeria, en Afrique du Sud, en Tunisie, en Israël/Palestine, et aussi en Chine, où nous luttons contre la dictature meurtrière du PCC. Depuis plusieurs décennies, nous avons construit une expérience de lutte contre des régimes autoritaires et oppresseurs sur place, comme contre le régime sud-africain de l’apartheid, et aujourd’hui contre le régime de Poutine en Russie. Notre parti mondial n’est pas une addition d’organisations nationales qui entretiennent des relations lointaines. Nous construisons un véritable parti mondial avec des sections nationales qui se voient régulièrement, discutent en dressent ensemble des analyses et des conclusions pour la construction de notre organisation internationale et dans ses sections.


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