Léon Lesoil, cofondateur du Parti communiste de Belgique (1921) et de la Quatrième Internationale (1938) est mort le 3 mai 1942 au camp de concentration de Neuengamme où il avait été déporté par les nazis. En ce mois de mai 2022, c’est l’occasion de commémorer à la fois l’anniversaire de sa mort tragique ainsi que la grève des mineurs de Charleroi (1932) dans laquelle il a joué un rôle décisif.
La crise de 1929 et ses conséquences
Dans les années vingt l’industrie minière occupait 150 000 mineurs en Belgique. La crise capitaliste de 1929 fit des ravages considérables, principalement dans les mines, la métallurgie et le verre. De plus les salaires des mineurs étaient indexés sur le prix du charbon industriel. C’est-à-dire que les mineurs subissaient à la fois le chômage et la baisse de leur salaire. En outre, les patrons charbonniers annoncèrent une baisse des salaires de mineurs de 5%. Il n’en fallut pas plus pour mettre le feu aux poudres.
Bataille politique pour le contrôle de la grève
Début juin 1932 les mineurs du Borinage partent en grève spontanée et propagent la grève aux bassins miniers de la région du Centre et de Charleroi. En juillet 1932 la grève s’étend à tous les charbonnages du pays. La Centrale nationale des mineurs, contrôlée par la Commission syndicale du Parti Ouvrier Belge, essaie de freiner la grève qui échappe peu à peu à son contrôle.
Le Parti Communiste de Belgique (PCB), comme tous les partis communistes de l’époque, est en pleine «troisième période». C’est-à-dire qu’ils interprètent la crise de 1929 comme le signe de l’agonie du capitalisme et lancent des mots d’ordre ultra gauchistes («Le fascisme et le social-fascisme sont des frères jumeaux») qui ont pour effet de diviser les rangs des travailleurs. Sur le plan syndical, le PCB lance l’Opposition syndicale révolutionnaire (OSR) et dans les mines la Centrale Révolutionnaire des Mineurs (CRM) dont le noyau se trouve à Seraing.
Grève générale et Comité de grève
Dans le bassin minier de Charleroi, sur 40 000 mineurs, 8 000 étaient affiliés à la Centrale des Mineurs, 550 aux Chevaliers du Travail. Alors que la Centrale Révolutionnaire des Mineurs somme les Chevaliers du Travail de décréter la grève, ceux-ci invitent le 11 juillet l’ensemble des mineurs de la région à un meeting à la Maison du Peuple de Gilly où plusieurs milliers de mineurs votent la grève. Au charbonnage du Gouffre à Châtelineau, Léon Lesoil est élu secrétaire du Comité de grève qui dirige la lutte. Les comités de grève permettent d’unifier dans un seul mouvement l’ensemble des grévistes quelle que soit leur affiliation syndicale ou politique. De la même manière que les conseils ouvriers (soviets) peuvent regrouper les travailleurs, quel que soit leur parti, lors d’une crise révolutionnaire.
Une forme de lutte exemplaire qui a laissé des traces
Cette expérience de lutte ouvrière s’appuyant sur des comités de grève a laissé des traces dans la conscience collective des militants ouvriers de la région de Charleroi. Ainsi, en 1973 et au cours des années qui ont suivi, les ouvriers verriers ont mis sur pied à plusieurs reprises, et avec succès, des comités de grève (y compris un comité régional inter-siège) pour diriger la lutte contre les fermetures et les pertes d’emplois.
Mort dans un camp de concentration
Léon Lesoil a été arrêté le 22 juin 1941, à la veille de l’invasion de l’Union soviétique par l’Allemagne nazie. Après trois mois de détention dans la forteresse de Huy, il a été déporté au camp de concentration de Neuengamme, près de Hambourg. Le travail exténuant et la maladie (la fièvre typhoïde) ont conduit Léon Lesoil à la mort le 3 mai 1942. Une pierre tombale en sa mémoire se trouve au cimetière de Châtelineau, dans le Hainaut.