Insorgiamo! La formidable histoire du collectif d’usine GKN à Florence

Photo : Andrea Sawyerr

Le 9 juillet 2021, la multinationale GKN, détenue par le fonds financier Melrose, a envoyé un mail aux plus de 400 travailleurs et travailleuses employé·es dans son usine de Campi Bisenzio (Florence). Ils et elles étaient licencié·es. L’usine, rentable, ne l’était toutefois pas assez. À la suite d’une assemblée générale, le personnel a occupé l’usine. Elle l’est toujours aujourd’hui et les métallos ont eux-mêmes récemment relancé la production pour produire des batteries électriques et des panneaux solaires. Nos camarades italiens et italiennes de Lotta per il socialismo en ont discuté avec Francesco Iorio, membre du collectif d’usine de l’ex-GKN.

Votre collectif d’usine existe depuis 2017. Pouvez-vous nous en dire plus sur l’histoire du collectif?

Nous sommes nés de l’usine FIAT de Florence. En 1994, FIAT a décidé de fermer sa succursale puis de vendre une partie de sa production à GKN. Parallèlement, un changement de génération a eu lieu dans la délégation syndicale. Nous nous sommes rendu compte que dans les assemblées, il y avait beaucoup de participation à l’écoute, mais beaucoup moins à l’action. Notre expérience du militantisme social et politique nous a poussés à chercher à créer un instrument qui nous relie au monde qui nous entoure et qui nous permette en même temps de nous organiser au sein de notre usine. C’est ainsi qu’est né le collectif d’usine GKN.

Les décisions sont prises lors d’assemblées générales, soit dans l’entreprise après la fin du travail ou dans d’autres espaces sociaux en soirée. C’est là que sont discutées les initiatives à prendre ou auxquelles on veut participer, chacun ayant son mot à dire. Un vote simple est ensuite organisé pour décider ce qu’il est préférable de faire ou de ne pas faire. Tout le monde peut proposer ses idées.

Dès qu’une lutte se développait sur le terrain, syndicale ou autre, le collectif d’usine sortait montrer sa solidarité et voir ce qui se passait, en participant ainsi également aux luttes d’autres entreprises en difficulté par des grèves, des collectes de fonds et une présence constante aux manifestations. Toute cette solidarité nous est revenue quand nous en avons eu besoin.

Comment avez-vous géré votre plan de reconversion de l’entreprise?

Beaucoup de personnes solidaires nous ont fait profiter de leur expertise tout simplement parce que chacun voulait voir une autre façon de faire tourner l’industrie. Pas une industrie basée sur un patron qui ramasse tout et s’en va quand ça lui chante, comme dans notre cas. Nous avons vu l’opportunité de développer une industrie différente, une industrie basée sur des principes de solidarité, d’éthique, de prise en compte du changement climatique, avec les compétences de solidarité de tout un territoire, d’ingénieurs aux juristes.

De nombreuses propositions nous sont parvenues et nous en avons discuté durant vingt mois. Ensuite, nous nous sommes orientés vers la production de panneaux solaires et de batteries électriques. Nous pensons qu’il faut donner de l’argent public à des entreprises publiques et non de l’argent public à des entreprises privées, comme cela a été fait jusqu’à présent. Surtout, ces entreprises doivent être aux mains des salariés. On nous a donné des indications, mais on a tout fait nous-mêmes. Notre idée est de créer un pôle public qui va dans le sens de la mobilité durable. Très souvent, l’expertise que nous obtenons provient des travailleurs solidaires, mais cela pourrait devenir un partenariat avec l’université publique.

À côté de cela, nous continuons à soutenir toutes les luttes. Ces vingt mois nous ont aussi fait grandir culturellement. Il y a tellement de questions que nous ne nous posions pas avant et qui, dans cette situation, nous ont fait prendre conscience qu’il y a un autre monde à l’extérieur. Nous avons donc donné un sens à ce que nous appelons la convergence des luttes. Nous venions de vingt ans de retard du mouvement syndical dans tant de luttes qui étaient moins visibles : des travailleurs précaires aux femmes, au mouvement LGBTQI+, au mouvement écologique. Nous avons compris que seul, personne n’est sauvé. Notre exemple est de dire: «Il n’y a plus d’emploi sûr, on peut être licencié à tout moment. Alors, pourquoi ne pas se mettre tous ensemble pour faire valoir les droits de chacun?» Et ensemble, nous avons aussi montré qu’il peut y avoir un autre avenir que celui que l’on veut nous faire croire.


Les communiqués de presse du collectif, avec des détails sur leur militantisme et leurs campagnes de crowdfunding, sont disponibles via leur newsletter: https://actionnetwork.org/forms/newsletter-collettivo-di-fabbrica-gkn.


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