Femmes en lutte, classe ouvrière en lutte!

Manifestation vers le cimetière de Aichi à Saqqez, ville Mahsa Amini dans le Kurdistan iranien / Photo : AFP Getty Images

Les batailles pour les droits des femmes rythment la lutte des classes depuis plusieurs années déjà. La crise du système pousse les puissants à extraire le plus de profit possible de notre travail. Faire reculer les droits des femmes est l’une des principales méthodes pour y arriver. Néanmoins, la lutte de classe ne se mène pas uniquement par un seul camp. Partout dans le monde, la classe ouvrière résiste, en particulier grâce aux femmes qui sont à l’avant-garde de plusieurs mouvements de masse. 

Les catastrophes climatiques, la guerre en Ukraine et plus généralement les effets inflationnistes de la nouvelle guerre économique entre la Chine et les États-Unis ont des impacts majeurs sur nos conditions de vie, notamment la hausse des prix à la consommation. La crise du coût de la vie est ressentie plus douloureusement par ceux – et surtout celles – qui sont aux prises avec les pires salaires et conditions de vie. 

Alors que les crises s’amplifient à nos dépens, la richesse des milliardaires augmente comme jamais auparavant. Cette situation a engendré une vague de radicalisation de jeunes femmes à l’échelle internationale. Elles jouent désormais un rôle prépondérant dans les récents mouvements de masse. Plusieurs soulèvements de 2022 nous ont montré comment les luttes contre l’oppression des femmes ont le potentiel de conduire à des luttes généralisées de toutes les classes populaires.

Iran: un condensé de la période actuelle

Suite à l’assassinat sexiste et raciste de Zhina Amini, les événements révolutionnaires en Iran donnent un aperçu condensé de l’état d’esprit de millions de personnes partout dans le monde. La lutte contre l’oppression des femmes est tenace depuis la dernière décennie. Elle a permis de  rassembler un soutien massif parmi la classe ouvrière et les masses pauvres. 

Pourquoi? Parce qu’il y a une tendance parmi de larges couches de la population à considérer l’ensemble du système comme le principal coupable et à tirer des conclusions anticapitalistes des événements, bien qu’elles demeurent confuses. En Iran, une jeune génération en colère s’est mobilisée héroïquement dans les rues face à une répression impitoyable. La classe ouvrière s’est jointe à la lutte avec une vague de grèves générales.

Désormais, la classe ouvrière est dans une phase de lutte pour les droits démocratiques et sociaux, pas uniquement économiques. Face à elle, la classe dirigeante est faible et en panique, mais très agressive. Au moment d’écrire ces lignes, il est difficile de savoir jusqu’où ira la révolution en Iran. Mais elle a déjà changé les perspectives de toute une génération.

Chine: répression contre les jeunes femmes

Les luttes pour les droits des femmes ont aussi joué un rôle important durant les soulèvements contre la politique zéro COVID chinoise en novembre dernier. La vague de dénonciations d’agressions sexuelles, les scandales d’esclavage sexuel ainsi que la nouvelle campagne gouvernementale visant à hausser les taux de natalité ont poussé une nouvelle génération de jeunes femmes à se battre contre le système.

L’expression «grève des naissances» est maintenant utilisée pour décrire les femmes refusant de faire passer le PIB capitaliste avant leurs propres désirs et leur bien-être. Le gouvernement chinois est terrifié par la radicalisation des jeunes femmes. Il a emprisonné une centaine de personnes en lien avec les grandes manifestations de l’hiver, en particulier des jeunes femmes. Certaines d’entre elles ont déclaré avoir été interrogées par la police spécifiquement sur le féminisme et les questions LGBTQIA+.

Ce que le régime craint le plus, c’est la fusion de la lutte des travailleurs et travailleuses sur les salaires, les licenciements, les conditions de travail et les prestations de retraite avec les luttes démocratiques contre la répression, la censure et pour les libertés fondamentales, y compris les droits des femmes.

États-Unis: droits des femmes, droits de la classe ouvrière

Aux États-Unis, l’abrogation de l’arrêt Roe v. Wade sur l’avortement a aussi suscité des rassemblements de masse partout au pays. Cette attaque sur le droit à l’avortement est une attaque contre le droit des travailleuses et de l’ensemble de la classe ouvrière de mener la vie famille qu’elles veulent sans s’appauvrir.

L’équipe de Kshama Sawant, la conseillère municipale de Socialist Alternative à Seattle, a mené la bataille en mobilisant les gens pour ainsi établir la première ville sanctuaire pour l’avortement aux États-Unis. Les camarades de Madison ont suivi cet exemple pour faire de leur ville la 2e! Ces victoires montrent ce que la solidarité entre les travailleurs et les travailleuses des différents États et villes signifie.

Beaucoup d’autres mouvements féministes des dernières années pourraient aussi être donnés en exemple, comme ceux du Brésil, de Belgique, d’Argentine, du Chili ou de l’État espagnol. Tous se heurtent aux États capitalistes qui tiennent à maintenir l’oppression des femmes pour une question de profits.

Durcissement des États capitalistes

Les classes dirigeantes refusent de faire des concessions pour calmer la colère actuelle. Pour les élites, la sécurité, la dignité et la liberté des femmes ne valent pas les coûts des investissements publics nécessaires. Les puissants du monde entier n’hésitent toutefois pas à investir leur argent ailleurs, pour «stimuler l’économie», comme les dépenses astronomiques réalisées dans l’industrie militaire sous le couvert de la guerre en Ukraine. 

Les classes dirigeantes continuent de s’en prendre à notre niveau de vie parce que les facteurs qui ont stimulé l’économie au cours de l’ère néolibérale touchent à leur fin. Le degré élevé de financiarisation de l’ensemble de l’économie crée une volatilité dans le secteur financier. Les longues chaînes d’approvisionnement entraînent des pénuries dans le processus de production. 

Les États optent de plus en plus pour un repli protectionniste et un État fort, autant en termes politiques qu’économiques. Alors que des millions de jeunes, de femmes, de travailleurs et de travailleuses se battent, les classes dirigeantes se tournent vers la répression et les forces réactionnaires. 

L’État chinois combat ouvertement le «féminisme». Celui de l’Iran exécute de jeunes manifestantes, alors que les droites américaine et brésilienne s’appuient sur les fondamentalistes chrétiens pour faire reculer les droits des femmes. Le danger que représentent ces forces qui profitent de la faiblesse du mouvement ouvrier ne doit pas être sous-estimé. Toutefois, l’exemple de l’Iran montre que même les régimes les plus répressifs peuvent être mis en danger, comme lorsqu’une lutte contre le port du hijab obligatoire se transforme en un combat contre l’ensemble du système.

Le Québec n’est pas en reste

Ici aussi la sensibilité politique sur les droits des femmes est répandue dans la population. Des vagues de dénonciations d’agresseurs en passant par le droit au logement et les grandes marches contre les féminicides, les liens entre les luttes féministes et la lutte contre le système capitaliste font leur chemin.

Ici aussi, nos gouvernements xénophobes pointent du doigt les femmes portant le hijab ou celles qui migrent au pays pour fuir la misère. Ni à elles ni à d’autres ils offriront des logements publics réellement abordables, une équité salariale ou des services publics gratuits et accessibles. La priorité pour l’instant, tant pour Legault que pour Trudeau, demeure de financer à coût de dizaines de milliards de dollars l’industrie militaire. 

C’est pour cette raison qu’ici aussi, les infirmières – notamment à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont – sont le fer de lance d’un militantisme ouvrier qui donne des résultats. Pourquoi? Parce qu’elles n’ont pas peur d’aller plus loin que ne leur permet la loi afin d’établir un vrai rapport de force face au harcèlement des gestionnaires et à l’intransigeance du gouvernement.

Partout dans le monde, l’idée de la grève réapparaît lors des conflits visant à mettre fin au sexisme et à la violence basée sur le genre dans les milieux de travail. Tout indique le potentiel de croissance d’un féminisme ouvrier qui cherche à construire la solidarité la plus large possible entre toutes les personnes exploitées et opprimées.

Ce potentiel ne peut être pleinement réalisé que par le développement d’un programme socialiste dans lequel la classe ouvrière dans toute sa diversité rassemble en un seul mouvement toutes les formes de lutte contre le système.

Le 8 mars est un grand rendez-vous international de lutte contre le sexisme. Il ne doit pas être une journée d’actions symboliques, mais plutôt une journée de lutte visant à réaliser des gains concrets. Des gains qui concernent tout le monde! Profitons du 8 mars pour organiser des actions combatives sur nos lieux d’étude et de travail!


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