Donald Trump et Robert Kiyosaki
De gros profits pour les milliardaires, des promesses en l’air pour les travailleurs.
À première vue, les résultats de l’élection présidentielle 2024 correspondent à l’image de Trump, celle d’un populisme économique et d’une politique anti-establishment. Selon les sondages aux sorties des urnes, Trump a rencontré l’opposition de la plupart des personnes issues des familles à revenus élevés ainsi que l’opposition généralisée des PDG des cent plus grandes entreprises. Il a remporté l’élection en partie grâce à une augmentation du soutien des électrices et électeurs à faibles revenus.
Mais un examen plus approfondi révèle une situation plus complexe. Comparé à Kamala Harris, un pourcentage beaucoup plus élevé du financement de la campagne de Trump provenait de milliardaires. Trump a donc reçu le soutien d’un échantillon représentatif de différents groupes de revenus. Qui bénéficie réellement de son retour au pouvoir?
Trump n’a rien à offrir aux travailleuses et aux travailleurs
Trump, qui semble avoir gagné en grande partie grâce à la colère suscitée par l’économie, a déclaré qu’il offrirait «les meilleurs emplois, les plus gros salaires et l’avenir économique le plus brillant que ce pays ait jamais connu». Mais il est peu probable que ses politiques bénéficient réellement à la classe ouvrière.
Prenons l’exemple des tarifs douaniers prévus par Trump, qui, selon lui, favoriserait le transfert d’emplois vers les États-Unis. En réalité, lorsqu’un pays impose des tarifs douaniers, les pays concernés ripostent généralement en imposant leurs propres tarifs. Le gouvernement mexicain et d’autres ont déjà déclaré qu’ils le feraient si Trump mettait ses menaces de tarifs à exécution. Les «guerres commerciales» de ce type ont tendance à réduire la croissance économique de tous les côtés.
Ensuite, considérons le plan de Trump concernant les expulsions massives. En plus de bouleverser des millions de vies, ces expulsions – si elles sont mises à exécution – auront des répercussions importantes sur l’ensemble de l’économie. Des entreprises fermeront parce que leurs employé·es ou leur clientèle ne seront plus là. Le résultat probable serait une perte nette d’emplois pour les citoyennes et citoyens des États-Unis.
Que dire des baisses d’impôts sur les sociétés qui, selon Trump, contribueront à stimuler l’économie? Ces baisses d’impôts devraient certes stimuler les bénéfices des entreprises, mais celles-ci semblent déjà avoir plus de profits qu’elles ne savent en faire. Les profits exceptionnels – issus des baisses d’impôts sur les sociétés décidées par Trump en 2017 – ont été en grande partie octroyés aux actionnaires au lieu d’être investis dans une production nouvelle. Comme l’a démontré une récente analyse des études existantes sur la question, il n’y a aucune raison de croire que les baisses d’impôts sur les sociétés stimulent la croissance économique.
De même, Trump a affirmé qu’il économiserait de l’argent sur les coûts de santé en interdisant la couverture des soins d’affirmation de genre. Mais cette position se fonde sur de fausses affirmations qui exagèrent largement les coûts réels de tels soins. En réalité, les dépenses de santé ont rapidement augmenté aux États-Unis parce que nous avons un système parasitaire à but lucratif qui existe pour soutirer le plus d’argent possible aux patientes et aux patients.
Compte tenu de l’état de l’économie américaine au cours des quatre dernières années, il n’est pas surprenant que beaucoup de gens se souviennent du premier mandat de Trump comme d’une période relativement meilleure. Mais bien que le revenu familial moyen corrigé de l’inflation ait augmenté de 8% au cours des quatre années de la première administration Trump, cela a en fait marqué un ralentissement significatif par rapport à la hausse de 12% enregistrée au cours des quatre années précédentes.
Trump et la dictature des riches
Même si Trump n’a pas réussi à stimuler la croissance économique au cours de son premier mandat, il a poursuivi la redistribution des richesses vers le haut, déjà en cours sous les administrations démocrates et républicaines. Telle est la logique d’un système politique dans lequel les deux principaux partis sont contrôlés et financés par les ultra-riches.
En fait, les riches dominent le système politique américain de diverses manières. Par exemple, lorsque de nouvelles lois sont votées, elles sont soumises à un «examen judiciaire» par les tribunaux. Cela donne un droit de veto aux juges qui, en plus d’être très bien payé·es, sont généralement issus de familles aisées et ont adopté la vision du monde fondamentale des riches. La majorité des juges actuels de la Cour suprême sont des millionnaires, et la Cour prend souvent des décisions qui avantagent les riches au détriment des gens ordinaires. De même, la mise en œuvre effective de la loi est généralement la responsabilité de fonctionnaires non élu·es et grassement payé·es qui espèrent souvent travailler un jour pour les entreprises qu’ils et elles sont censé·es réglementer, créant ainsi une relation de «porte tournante» corrompue .
Le résultat est un système truqué en faveur des riches. Par exemple, en 1916, le Congrès a voté une loi interdisant le travail des enfants (la loi Keating-Owen). Mais la Cour suprême a tout simplement déclaré cette loi inconstitutionnelle et l’a annulée. Plus tard, dans les années 1930, sous la pression d’une vague de grèves de masse, les tribunaux ont été contraints d’accepter une nouvelle interdiction du travail des enfants. Mais aujourd’hui encore, cette interdiction reste souvent lettre morte, car le besoin des entreprises en main-d’œuvre bon marché prime sur le bien-être des enfants. En fait, les employeurs aux États-Unis peuvent violer systématiquement le droit du travail en toute impunité, tandis que les petites infractions commises par les pauvres sont sévèrement réprimées.
Dans ce système dominé par les milliardaires, des divergences politiques peuvent encore exister. Par exemple, la bataille autour du plafond de la dette en 2023 a été essentiellement une lutte entre différentes factions de donateurs ultra-riches et la Chambre de commerce des États-Unis. De même, lors des élections de 2024, les milliardaires étaient divisés dans leur soutien entre Trump et Harris. Mais il ne faut pas confondre cela avec l’idée que l’un ou l’autre groupe de milliardaires, ou leurs représentantes et représentants, se battront pour la classe ouvrière. Ce n’est pas le cas.
En bref, malgré son apparence anti-establishment, l’approche de Trump s’inscrit parfaitement dans un système politique qui a toujours fonctionné comme une dictature des riches. Les socialistes appellent au renversement de ce système. Nous luttons pour une nouvelle société dans laquelle l’économie est placée sous contrôle public et où tous les postes d’autorité publique sont élus, révocables et payés au salaire moyen des travailleuses et travailleurs.
À quoi s’attendre sous Trump 2.0
Sans surprise, Trump a choisi deux milliardaires, Howard Lutnick et Linda McMahon, pour diriger «l’équipe de transition» qui constitue sa nouvelle administration. Ces décisions en matière de recrutement devront également être approuvées par le Sénat, qui a longtemps été le club des millionnaires. Ainsi, pendant le second mandat de Trump, les riches continueront de diriger les choses.
Pour avoir une idée de ce que cela signifiera au cours des quatre prochaines années, il est utile de revenir sur la promesse de Trump de procéder à des expulsions massives. Certains des adeptes de Trump issu·es de la classe ouvrière pourraient croire que si davantage de travailleuses et de travailleurs sans papiers sont expulsé·es du pays, cela fera augmenter les salaires de tous les autres. Mais cela ne tient pas compte de la manière dont fonctionne réellement un système dirigé par des milliardaires.
Dans la pratique, les entreprises utilisent les expulsions comme une tactique pour briser les syndicats. Lorsque des immigré·es sans papiers se battent pour obtenir de meilleurs salaires ou participent à des campagnes syndicales, les patrons les repoussent souvent en les expulsant. De cette façon, la menace d’expulsion contribue à une course vers le bas qui dégrade le niveau de vie des travailleurs et travailleuses. Tant que les milliardaires dirigeront les choses, ils veilleront toujours à avoir autant de main-d’œuvre bon marché qu’ils en ont besoin. Les expulsions ne serviront qu’à diviser et à intimider davantage la classe ouvrière, tout en détruisant des vies et en déchirant des familles.
Les socialistes réclament une extension complète des droits du travail et des droits politiques à tous les travailleurs et travailleuses, quel que soit leur statut d’immigration. Nous devons combattre les tactiques de division des milliardaires et lutter pour une nouvelle société dirigée démocratiquement par la classe ouvrière. Au cours des quatre prochaines années, cette lutte devra inclure la création de comités d’action dans les écoles, les quartiers et les milieux de travail pour organiser une résistance massive contre les expulsions.