Pour la libération queer! Pas le capitalisme arc-en-ciel!

Pourquoi la Fierté est-elle passée d’une manifestation soulignant une émeute contre la brutalité policière à une énorme campagne publicitaire commerciale qui s’étale sur plus d’un mois?

L’année dernière, les spectatrices et les spectateurs de la marche des Fiertés sont restés debout pendant des heures sous une chaleur accablante, alors que le lent défilé commercial avançait péniblement, sans aucune substance politique. L’année d’avant, le comité organisateur a dû carrément annuler le défilé à la dernière minute pour des raisons logistiques. Des activistes queer ont toutefois pu reprendre la balle au bond en organisant une manifestation pour les droits LGBTQ+ la journée même.

La fierté du dollar tout-puissant

L’une des principales victoires remportées par les mouvements pro-LGBTQ+ au cours des dernières décennies a été un véritable changement de la conscience des gens par rapport à l’oppression sexuelle et de genre. Alors que la classe capitaliste n’était certainement pas prête à intégrer pleinement les gais et les lesbiennes dans la société, un changement notable s’est opéré en faveur de l’acceptation de l’homosexualité dans la seconde moitié du 20e siècle. En échange de cette acceptation bienveillante, les chefs d’entreprise capitalistes ont découvert qu’ils pouvaient bénéficier d’un accès à un tout nouveau marché.

Tout au long des années 1990, les entreprises ont rapidement commencé à tirer avantage de « l’argent rose ». Le parrainage des parades et des festivités gaies est devenu monnaie courante. Les gais qui réclamaient des fonds pour la recherche sur le VIH/sida ou qui condamnaient les brutalités policières ont été relégués à l’arrière-plan. Plutôt que des manifestations à caractère politique, nous avons maintenant des défilés durant lesquels passent des chars allégoriques commerciaux ainsi que des politiciens et des politiciennes qui défendent davantage le monde des affaires.

Au Québec, les semaines entourant celle de la Fierté de Montréal, au début août, sont devenues d’abord et avant tout celles des campagnes publicitaires pro-LGBTQ+. Ailleurs, les festivités se déroulent en juin, en hommage aux émeutes de Stonewall.

Les célébrations sans substance du mois de la fierté ne sont pas simplement le résultat d’une mauvaise gestion ou d’un manque d’imagination. Elles font suite à des années de dépolitisation délibérée des luttes et de l’histoire des personnes LGBTQ+. Mais ces enjeux continuent de toucher de larges couches de la population. Si les capitalistes wokes et leurs institutions ont flairé la bonne affaire en tirant profit de ces nouveaux marchés, les organisations ouvrières et étudiantes pourraient inverser la vapeur en prenant des initiatives sérieuses sur les enjeux de la libération queer.

Des symboles importants, mais des raisons cyniques

La prise de position des entreprises en faveur des droits LGBTQ+ peut avoir un impact positif dans le climat politique actuel. Mais il est important de savoir ce que vaut cet « appui ». Les entreprises veulent, d’abord et avant tout, faire des bénéfices. La plupart des personnes de la génération Z (nées entre 1997 et 2012) sont sur le marché du travail et constituent la génération la plus queer à ce jour. Près de 16% s’identifient comme LGBTQ+ aux États-Unis, alors que ce nombre est de 9% parmi les milléniaux (né⋅es entre 1981 et 1996).

Les compagnies ne veulent pas passer à côté de ce groupe démographique clé lorsqu’il s’agit de vendre leurs produits. Elles sont prêtes à produire n’importe quoi aux couleurs de l’arc-en-ciel si cela peut leur remplir les poches. Mais ne vous attendez pas à avoir un salaire décent assorti d’avantages sociaux comme des soins de santé reconnaissant le genre choisi!

Ces mêmes compagnies sont tout aussi heureuses de redonner l’argent des consommateurs et consommatrices LGBTQ+ aux élites politiques de droite ou à des organisations anti-gais. Par exemple, Bud Light a stoppé sa lucrative collaboration avec l’influenceuse trans Dylan Mulvaney, suite aux réactions brutales de la droite. Les bouteilles arc-en-ciel n’ont pas empêché la compagnie de donner plus de 300 000$ au Parti Répulicain. Les entreprises ont beau prêcher l’inclusion, la réalité est qu’elles ne seront jamais des alliées dans la lutte pour la libération queer, puisqu’elles ne veulent pas la fin du capitalisme.

Reconstruire une fierté combative!

Si nous voulons ramener la fierté à ses racines radicales, nous ne pouvons pas compter sur les entreprises et les élites politiques. Nous devons le faire nous-mêmes! Les éléments les plus radicaux du mouvement se sont attelés à cette tâche au fil des ans en organisant des marches indépendantes pour protester contre la « fierté capitaliste ». Il s’agit là d’une démarche incontestablement positive.

Mais les organisations qui en sont à l’origine souffrent souvent des mêmes défauts qui ont causé la perte de groupes comme ACT UP, engagés dans la lutte contre le VIH/sida et la répression policière. Elles sont dominées par une approche horizontale de l’organisation, manquent de structures démocratiques et n’ont généralement pas de programme ou de revendications susceptibles d’attirer l’ensemble de la classe ouvrière dans la lutte. En tant que tels, ces groupes et ces marches sont souvent en proie à des désaccords politiques internes et se retrouvent marginalisés et boudés par les participants et les participantes du défilé commercial.

Afin d’étendre le mouvement au-delà des limites des cercles radicaux, le mouvement a désespérément besoin de s’organiser et de s’enraciner massivement dans la classe ouvrière pour se doter de véritables structures démocratiques et d’une direction redevable.

Cependant, le mouvement de libération queer n’a pas seulement besoin d’une organisation de masse comme véhicule de lutte. Il a également besoin d’une direction et d’un leadership politique révolutionnaire. La libération des personnes opprimées ne peut être obtenue sous le capitalisme. Ce n’est que par une lutte de classe révolutionnaire et la construction d’une économie socialiste qui répond aux besoins réels des gens que nous pourrons commencer à mettre véritablement fin à l’oppression sous toutes ses formes.

Sans une direction politique qui comprenne cela et qui travaille avec diligence pour étendre la lutte parmi toute la population, le mouvement continuera soit à talonner les élites politiques « progressistes », soit à se condamner à la marginalité militante.

• Non au Pinkwashing de la Fierté! La Fierté est une manifestation! Pas de compagnies ou de police à la marche!
• Des soins de santé pour tout le monde! La pandémie n’est pas terminée, qu’il s’agisse de la COVID-19 ou du VIH/sida. Tout le monde a besoin d’un accès gratuit aux soins de santé. Pour des tests de dépistage au VIH/sida (PrEP) et ITSS gratuits, pour des traitements sur demande et pour des soins de santé qui tiennent compte du genre choisi.
• Un logement pour tout le monde! Les personnes queer sont confrontées à des niveaux disproportionnés d’itinérance et de discrimination en matière de logement. Pour un réel contrôle des loyers, la construction de logements publics abordables et l’interdiction des évictions.
• Organisons-nous! Pas de libération queer possible sous le capitalisme! Bien que nous puissions remporter des victoires, nous ne pouvons pas gagner la libération sexuelle sous le capitalisme. Sans un contrôle démocratique de la classe ouvrière sur notre économie et notre culture, nous ne pouvons mettre fin à aucune oppression.

Pour gagner un monde socialiste libéré de l’oppression, nous devons nous organiser politiquement!

Rejoignez-nous pour discuter des prochaines étapes du mouvement de libération queer et de la façon dont vous pouvez vous impliquer!


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