Pourquoi la grève générale est-elle si importante dans l’arsenal du mouvement ouvrier?

Le changement socialiste expliqué

Dans le cadre de la préparation de la grève générale du 9 novembre, nous avons interrogé un véritable vétéran des luttes ouvrières en Belgique : Gustave Dache. Syndicaliste révolutionnaire durant des décennies, délégué FGTB à Caterpillar et à Citroën, il a également très activement participé à la grande grève générale de l’hiver 1960-61, sujet de son livre La grève générale insurrectionnelle et révolutionnaire de l’hiver 1960/61.

« La lutte de classe n’est pas tous les jours combats de rue, dépavages, arbres abattus, dynamitages, confrontations entre bulldozers et autopompes de la police… C’est surtout un combat au sein même de la classe ouvrière dans les assemblées politiques et syndicales, afin de convaincre les hésitants que la lutte est une lutte continue. A 86 ans, comme pensionné FGTB, je vais toujours aux assemblées interprofessionnelles à Charleroi et j’y interviens toujours pour défendre les méthodes et l’héritage des anciens vétérans trotskistes de Charleroi qui s’étaient illustrés dans les années ’30.

« La grève générale, c’est l’arme principale de la classe ouvrière, avec ses piquets de grève et le blocage total de toute l’économie. Une vraie grève générale, c’est un engagement dans une lutte sans merci. Mais à l’heure actuelle, on fait des grèves générales sans lendemain, j’appelle ça des grèves d’escarmouche.

« Si on veut arracher des victoires comme dans le passé, il faut paralyser toute l’économie du pays, mais pas de façon limitée à 24 heures. Il faut un plan d’action jusqu’à la grève générale reconductible jour après jour par la base, jusqu’à satisfaction, quand on a obtenu gain de cause et pas à mi-chemin, avec des compromis boiteux discutés dans le dos des travailleurs. Et si le système capitaliste est incapable de nous fournir le minimum décent que nous exigeons aujourd’hui, c’est qu’il est plongé dans une multitude de crises, de l’énergie à l’économie en passant par le climat. Ce ne sont pas des crises passagères, c’est une crise fondamentale du système lui-même. Il ne peut être régénéré, il doit être mis aux oubliettes de l’histoire.

« Quand une telle grève générale commence, on ne sait jamais quand elle va se terminer. J’ai toujours constaté que, généralement, ce sont les travailleurs qui veulent la grève générale. Les appareils syndicaux freinent et jouent le rôle d’une soupape de sécurité pour éviter que ça ne débouche sur des mouvements insurrectionnels et révolutionnaires. D’où l’importance de comités de grève démocratiques qui jouent le rôle de direction de combat. Les comités de grève sont toujours importants dans une grève générale, contrairement à ce qu’on pourrait nous faire croire. Ça permet le contrôle d’en-bas contre les réticences et les hésitations d’en-haut.

« Une grève générale qui paralyse toute l’économie pose la question : « qui est maître dans le pays ». Et en même temps, toute grève générale pose la question du pouvoir. Beaucoup de gens veulent un changement de société, sans savoir comment faire. La clé, c’est la grève générale. Qui peut bloquer toute l’économie peut décider de la relancer, mais cette fois sous gestion et contrôle des travailleurs. C’est ça, la vraie démocratie ! »


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