Colombie-Britannique : Les changements climatiques sèment la dévastation

Le sud de la Colombie-Britannique a été frappé par deux événements météorologiques catastrophiques en quelques mois: d’abord la canicule et le feu, puis la pluie et les inondations. Les 13 et 14 novembre, le ciel s’est ouvert lorsqu’une «rivière atmosphérique» a traversé une grande partie du sud de la Colombie-Britannique. Elle a provoqué le débordement de rivières, des glissements de terrain et la rupture de voies ferrées et d’autoroutes.

Tout cela s’est produit après un été accablant, à commencer par le dôme de chaleur du mois de juin, qui a fait 815 morts, et l’incendie de la ville de Lytton. De nombreux habitants et habitantes de la Colombie-Britannique et d’ailleurs ont vécu un été d’incendies et de ciels enfumés. Plus de mille feux de forêt ont fait rage dans la province. Deux mois entiers de pluie se sont ensuite manifestés à partir de septembre.

Routes disparues

Au Canada, toutes les autoroutes qui partent du Lower Mainland (le Grand Vancouver et la région côtière environnante) sont coupées ou ont été emportées par les eaux. Des centaines de personnes ont été piégées sur l’autoroute 7 pendant des heures, entre deux glissements de terrain. En plus d’être sous la menace d’autres glissements provenant de la montagne voisine, elles ont fini par attendre toute la nuit et pendant de nombreuses heures le lendemain pour l’arrivée d’un hélicoptère des Forces canadiennes.

Des conducteurs se dirigeant vers le nord de Lillooet sur l’autoroute 99 ont été confrontés à un glissement de terrain juste devant eux. Ils ont vu des voitures et leurs occupants être emportés hors de la route par la boue et les débris de la montagne, enterrant à moitié les voitures. Les témoins se sont précipités pour secourir les gens, mais au moins une des voitures restait introuvable. Au moins quatre décès ont été confirmés.

L’autoroute transcanadienne (autoroute 1) a été détruite en plusieurs endroits. L’autoroute 3, qui longe la frontière sud (vers les États-Unis), a été fermée dans les deux sens en raison d’un glissement de terrain.

L’autoroute de Coquihalla (autoroute 5), l’une des principales autoroutes de la Colombie-Britannique reliant le Lower Mainland et l’Intérieur, a subi des dommages catastrophiques. Les voies en direction du sud d’une section de l’autoroute ont été emportées dans la rivière. L’autoroute pourrait être fermée pendant des mois. Les secouristes sont toujours à la recherche de véhicules disparus et de personnes bloquées.

Villes inondées

Toute la ville de Merritt, située dans une région sèche et désertique de l’Intérieur, a fait l’objet d’une alerte d’évacuation cet été en raison des feux. Elle a dû être à nouveau évacuée le 15 novembre. La crue des eaux a rendu la station d’épuration des eaux usées de la ville inopérante pour «une période indéterminée». Deux des trois ponts de la ville qui enjambent la rivière Coldwater ont été endommagés par les eaux des crues et le troisième n’est plus praticable.

La majeure partie de la ville de Princeton a été submergée lorsque la rivière Similkameen a fait céder la digue. 295 maisons ont été évacuées et 300 autres sont en état d’alerte. Aujourd’hui, la ville est privée de gaz (en raison des dégâts causés par les inondations). Alors que les températures ont plongé à -6°C, de plus en plus de personnes ont dû partir pour trouver un endroit chaud où dormir.

Plus de 1 100 foyers d’Abbotsford ont été évacués. Les inondations à Abbotsford, Chilliwack et dans d’autres parties de la vallée du fleuve Fraser ont vu des résidents et des résidentes suffisamment chanceux pour naviguer dans les rues sur leurs canots et autres bateaux.

Plus de 20 000 personnes ont été déplacées. Plusieurs ont regardé leur maison être emportée par les torrents.

Les incendies de l’été, ainsi que l’exploitation forestière, ont rendu les pentes plus instables, car il n’y avait plus de racines d’arbres pour retenir le sol. L’absence d’arbres, qui ralentissent normalement le ruissellement, a intensifié les inondations.

Crise du transport des marchandises

Les camionneurs qui vont et viennent du Lower Mainland vers d’autres régions de la Colombie-Britannique et du Canada ne peuvent pas apporter les provisions nécessaires. En plus de la fermeture de toutes les routes sortant du Lower Mainland de la Colombie-Britannique, les chemins de fer du Canadien National et du Canadien Pacifique sont endommagés. Ce sont les principales voies d’entrée et de sortie des cargaisons dans le port de Vancouver. Le chaos qui règne au port, dû à la perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales, est maintenant bien pire. Les importations ne peuvent pas être acheminées vers le reste du Canada depuis Vancouver et les exportations, en particulier les récoltes de cette année en provenance des Prairies, sont bloquées.

On craint déjà des pénuries dans les magasins, l’essence manque dans certaines régions. Certaines communautés de l’île de Vancouver n’avaient que trois jours de provisions alimentaires et deux jours se sont écoulés depuis les inondations. Il faudra probablement des semaines, voire des mois, pour réparer certaines routes. On ignore également combien de temps il faudra pour réparer les voies ferrées.

Faire le point

Le 16 novembre, le soleil a brillé sur un paysage dévasté, mais d’autres pluies sont à venir. Les autorités de la Colombie-Britannique font le point sur l’ampleur des dégâts causés aux villes, aux villages, aux routes, aux ponts, aux chemins de fer et aux autres infrastructures. Des personnes ont perdu leur maison à cause des dégâts causés par les inondations. Au cours de l’été, on a estimé qu’un milliard d’animaux du littoral de la mer de Salish pourraient être morts à cause de la vague de chaleur. Aujourd’hui, des milliers d’animaux d’élevage sont morts à cause des graves inondations dans la vallée du Fraser et beaucoup de ceux qui ont survécu ou ont été secourus ont besoin de nourriture et d’eau.

À l’instar de la vague de chaleur qui a battu tous les records en juin, les météorologues qualifient cette tempête de «sans précédent». «Nous avons vu maintenant notre cinquième rivière atmosphérique de la saison. Souvent, nous n’en avons même pas de première avant novembre», a déclaré Armel Castellan, météorologue d’Environnement Canada chargée de la préparation aux alertes. Elle a affirmé que la dernière rivière atmosphérique a généré des «données époustouflantes» et annoncé qu’Environnement Canada devra analyser ces chiffres pendant les jours et les semaines à venir, car ils sont extraordinaires. Comme en juin, de nombreux records ont été fracassés. Cette fois, il s’agit de records de précipitations plutôt que de records de chaleur. Le district de Hope et la ville de Chilliwack ont battu des records historiques de précipitations.

On ne peut échapper à la réalité des changements climatiques. En l’espace de moins de cinq mois, la Colombie-Britannique a connu des événements météorologiques «sans précédent», qui ont battu des records. Ces événements ont et auront un impact sur la vie quotidienne de millions de personnes et sur les moyens de subsistance de milliers de travailleuses et de travailleurs.

Les politiciens de la COP26 éloignés de la réalité

Les leaders politiques ont clôturé la 26e réunion des Nations unies sur les changements climatiques le dimanche 14 novembre, pendant qu’une pluie torrentielle s’abattait dans le sud de la Colombie-Britannique. De nombreux observateurs et observatrices étaient sceptiques dès le départ quant aux chances de parvenir à un accord sur des objectifs significatifs. Ne s’attendant pas à grand-chose, ces personnes ont été déçues, mais ont aussi haussé les épaules. Du bla-bla-bla et de nombreux objectifs encore repoussés à un futur plus ou moins lointain. De nombreuses personnes pleines d’espoir, qui croyaient à moitié aux discours des gouvernements avant la COP26, ont vu leurs espoirs déçus une fois de plus. Comme l’a fait remarquer quelqu’un, plusieurs traversent «un processus de deuil».

Les politiciens et les politiciennes qui se sont réunis à la COP26 semblent éloignés de cette réalité. Une représentante des Îles Marshall a été interrogée sur son amère déception face aux objectifs édulcorés. Les changements climatiques menacent l’existence même des Îles Marshall.

Auimatagi Joe Moeono-Kolio, conseiller politique principal pour le Pacifique auprès de l’Initiative pour un traité de non-prolifération des combustibles fossiles, a noté que «la première version d’un texte par ailleurs très peu ambitieux comportait un point positif notable : l’élimination progressive du charbon. Ce point a encore été édulcoré. Pour une planète en crise, cela représente un échec monumental dans la reconnaissance du danger clair et imminent auquel sont exposés des pays entiers, y compris le mien.»

«Malgré le brouhaha et l’écoblanchiment d’hier, un fait fondamental demeure : nous nous dirigeons toujours vers un monde de 2°C et plus d’augmentation», a-t-il déclaré.

Le Climate Action Tracker indique qu’avec les engagements de la COP26, le monde sera de 2,7°C plus chaud d’ici 2200. La Colombie-Britannique a été témoin des conséquences d’un réchauffement de 1,1°C (réchauffement estimé à ce jour). Que se passera-t-il avec un réchauffement de 1,5°C ou encore de 2,7°C?

Les élites politiques ne se réveilleront pas

En tant que marxistes, nous comprenons que l’histoire, tout comme une rivière, ne coule pas en ligne droite. Les politiciens et les politiciennes sont redevables à la classe sociale qu’ils représentent : les riches investisseurs, l’élite d’affaires, les oligarques du pétrole et des ressources naturelles. Certaines personnes, comme le premier ministre canadien, disent une chose et agissent de manière totalement incohérente avec leurs paroles. Les libéraux fédéraux continuent de construire l’oléoduc Trans Mountain et de subventionner les combustibles fossiles. Seth Klein les décrit comme les «nouveaux négationnistes du climat». Les libéraux voient ce qui se passe, mais leur refus d’agir est dû à leur allégeance à leur propre classe politique.

On ne sait pas exactement quel sera l’élément déclencheur, mais la colère accumulée à cause de cette inaction va éclater. Le rôle des socialistes est de se préparer: sensibiliser les gens, s’éduquer politiquement et éduquer les autres autour de nous pour ensuite construire des mouvements de résistance. Malgré une mobilisation héroïque lors de la COP26, la  voix des résistants et résistantes a été ignorée, noyée dans le bruit du bla-bla-bla plein de fausses promesses qui ne mènent nulle part.

Contrairement à beaucoup de gens de la gauche progressiste, nous avons une réponse claire à la question de savoir ce qu’il faut faire. La seule réponse qui sauvera l’humanité de la catastrophe climatique et des autres calamités du capitalisme est un monde qui n’est pas redevable aux désirs des riches et à l’hypocrisie des élites politiques qui leur obéissent. L’humanité a besoin d’un système qui valorise les personnes plutôt que le profit, qui planifie collectivement et démocratiquement dans l’intérêt du plus grand nombre et non de quelques personnes. Nous devons confisquer les ressources des riches et les utiliser pour le bien public. La seule façon saine d’avancer. Ça s’appelle le socialisme.


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