Syndiquées de l'APTS en grève le 7 juin 2021

Journées de grève à l’APTS

Syndiquées de l'APTS en grève le 7 juin 2021

C’est sous les klaxons de solidarité et les remerciements des gens qui passaient par là que les 60 000 travailleuses et travailleurs de la santé de l’APTS ont débuté leur mandat de grève lundi et mardi dernier.

Ces appuis envers les membres de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) sont venus de plusieurs personnes du domaine du transport scolaire, du transport en commun, du secteur de la construction, des services d’incendie ou d’urgence. Les camarades d’Alternative socialiste sont venus appuyer les grévistes sur trois piquets dans le Sud-Ouest de Montréal (Hôpital de Verdun, CLSC de Verdun et Hôpital Douglas). 

La CAQ instrumentalise l’état d’urgence

L’APTS est le premier syndicat de la santé à exercer son droit de grève dans le cadre des négociations du secteur public débuté officiellement à la fin mars 2020.

La colère des travailleurs et travailleuses est plus que légitime. L’état d’urgence sanitaire – maintenu artificiellement en vie par le gouvernement du Québec – sert à la Coalition avenir Québec (CAQ) pour contrôler de manière détournée la gestion du personnel dans le secteur public.

À la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) par exemple, plusieurs affichages de postes ne sont pas faits afin d’éviter que les travailleurs et travailleuses postulent ailleurs dans le réseau. Le gouvernement tente ainsi d’éviter une rupture de services en obligeant le personnel à demeurer là où il est. Cela est possible à cause des décrets imposés par l’état d’urgence sanitaire. Ces décrets sont contraires aux procédures normales prévues dans les conventions collectives. 

Durcir les moyens de pression ou attendre la loi spéciale?

La solution pour mettre fin à cet état d’urgence injuste et améliorer nos conditions de travail passe par une mobilisation militante de tous les «anges gardiens», et maintenant! 

Plusieurs personnes avec qui nous avons discuté savent bien qu’une loi spéciale – une loi fixant unilatéralement les conditions de travail – plane. On y avance même la date de la fin de la session parlementaire, à la fin juin. 

Une travailleuse de l’Hôpital de Verdun est bien consciente du problème.  «Faire une grève comme ça, ça n’a pas d’impact. Il faut se mettre tous ensemble et bloquer le centre-ville». 

Elle souligne ici une question stratégique déterminante pour le droit de grève en santé et services sociaux. Si une grève légale en santé n’a pas le même impact sur le patronat qu’une grève dans le privé, il faut trouver des alternatives pour frapper plus fort. D’une part, il faut durcir le rapport de force pour aller chercher des gains. D’autre part, les patients et les patientes ne peuvent pas attendre. Grève ou pas, il faut les soigner.

Une solution passe par le «durcissement» des journées de grève. C’est-à-dire qu’elles doivent frapper l’État au portefeuille en ciblant ses compagnies et ses institutions profitables. 

Taxons les riches pour financer les services publics!

Nous avons fait signer notre pétition Taxons et imposons les riches pour financer les services publics! lors de toutes nos interventions dans le milieu de la santé depuis le début de la pandémie. Jusqu’ici, personne n’a été contre l’idée.

Tout le monde sait que si la CAQ a 10 milliards $ à investir pour construire un tunnel inutile à Québec, elle devrait avoir de l’argent pour les services publics! Un travailleur de l’Hôpital Douglas nous a mentionné: «Qui est contre ça, taxer les riches?». Effectivement, tout le monde est d’accord en principe. Même le gouvernement de Justin Trudeau nous promet une taxe sur les géants du web… probablement après les prochaines élections fédérales!

Mais une sérieuse taxation des super-riches et l’abolition des paradis fiscaux demanderont pas mal plus de force politique. On aura besoin de celle de la classe des travailleurs et travailleuses organisée de manière indépendante. Le cas de la conseillère municipale socialiste de Seattle, Kshama Sawant, est un bon exemple. Lorsqu’une taxe historique sur les grandes compagnies est gagnée au conseil municipal grâce à une campagne de terrain, les grandes compagnies sont prêtes à toutes les attaques sur le mouvement ouvrier pour faire marche arrière.

«Je protège le réseau public»

Le slogan mis de l’avant par le syndicat souligne clairement que l’amélioration des conditions de travail du personnel de la santé est d’abord et avant tout une lutte pour améliorer et protéger les services publics. 

Pour les travailleurs et travailleuses avec qui nous avons discuté, la question salariale est importante. Mais les revendications concernant la surcharge de travail étaient sur toutes les lèvres. 

Certains, comme à Québec solidaire, proposent des embauches massives dans le secteur public afin de régler ce problème. Le réseau a effectivement besoin de bras supplémentaires. Mais l’enjeu actuel est celui de la rétention du personnel. La question est plus complexe que le simple ajout d’effectifs. Des postes à pourvoir, il y en a déjà des milliers! Le problème, c’est qu’il n’y a pas assez de personnes qui veulent les combler dans les conditions actuelles.

Les conditions de travail qui empirent en poussent plusieurs à faire le saut dans les compagnies privées ou dans les agences de placement où le salaire horaire est plus élevé. Les privatisations des dernières années ont entraîné une dépendance du secteur public à certains services assurés par des entreprises privées. Pire encore, le public doit souvent réembaucher à travers les agences de placement d’anciens et d’anciennes employées qu’on paie désormais beaucoup plus cher! 

Ce type de gestion est absurde et inefficace. Au final, elle ne bénéficie qu’aux compagnies privées. Comme Alternative socialiste le mentionnait au début de la pandémie en mai 2020, il est essentiel que «toutes les compagnies privées liées à la production de matériel et de services médicaux essentiels» passent sous contrôle public afin d’arrêter ce gaspillage d’argent et de ressources.

Scénarios possibles

Pour gagner la lutte du secteur public, nous n’avons pas 1 000 options. Pour la prochaine étape, tous les syndicats de la santé devraient entrer en grève en coordination avec les journées de l’APTS (21 et 22 juin). Ces journées devraient impliquer des actions militantes de perturbation économique de plus en plus dures.

Si le gouvernement sort une loi spéciale, la lutte et la solidarité doivent continuer. Plusieurs pensent qu’il vaut mieux arriver à une entente à rabais sans loi spéciale qu’à une loi spéciale qui ne tiendrait pas compte de nos demandes. C’est voir les choses à l’envers. La puissance de notre rapport de force s’établit grâce à une lutte résolue. C’est elle qui déterminera les résultats. Pas notre propension à «être responsables», à écouter les boss et le gouvernement quand ils nous disent de rester tranquilles. 

Maintenir la pression par la lutte est l’unique manière de former des militantes et des militants syndicaux en mesure de résister à une loi spéciale de manière créative et démocratique.

Depuis le début, l’objectif du gouvernement est de fragmenter le mouvement syndical. En signant des ententes sectorielles avec plusieurs grands syndicats, le cours des négociations est de moins en moins favorable aux syndiqué⋅es. Dans la logique de diviser pour mieux régner, la CAQ veut ultimement replonger les syndicats dans la lutte fratricide du maraudage afin d’anéantir encore davantage les liens de solidarité forgés jusqu’ici. Ne nous laissons pas avoir!

Les organisations syndicales devront signer le plus rapidement possible un protocole de non-maraudage, comme en 2019. La pandémie nous l’a montrée, de l’argent à portée du gouvernement, il y en a! Participons à mettre sur pied une campagne politique de terrain pour taxer et imposer les super-riches afin de financer les services publics! Les syndiqué⋅es du secteur public trouveront leurs meilleurs allié⋅es en mobilisant massivement la population.

La construction d’un large mouvement permettrait de poser les bases en vue de la tenue d’une grande grève politique d’envergure pour la défense des services publics. Ces démarches sont cruciales afin de construire une force politique indépendante des partis du patronat et des grandes compagnies. Une force politique qui pourra diriger la société afin qu’elle réponde à nos besoins, en particulier à notre droit d’être en santé.

D’ici là, si vous voulez militer dans le secteur de la santé avec des socialistes de différents syndicats et catégories d’emploi, contactez le Comité de mobilisation santé d’Alternative socialiste au comdemobsante@gmail.com

Ensemble, nous vaincrons!


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