Seule la lutte peut empêcher le recul de l’émancipation des femmes

Par rapport à l’an dernier, le 8 mars aura lieu dans un monde totalement différent. «La pandémie de covid-19 menace de réduire à néant les progrès réalisés en matière d’opportunités économiques pour les femmes et de creuser l’écart entre les sexes qui subsiste malgré 30 ans de progrès», a écrit le Fonds Monétaire International (FMI) l’été dernier. Dans une opinion publiée dans le Volkskrant (01/11/2020), deux féministes déclaraient clairement : «La pandémie menace aussi l’émancipation».

Pour être tout à fait honnête, le FMI aurait dû parler de «progrès très limités et à peine perceptibles» de ces 30 dernières années et souligner que cela s’est produit dans un contexte d’inégalités croissantes où la croissance économique n’a guère profité à la majorité de la population. Mais une chose est claire : les luttes de masse des femmes qui se sont produites à travers le monde cette dernière décennie devront se poursuivre, s’étendre et gagner en organisation si l’on souhaite éviter que la pandémie ne soit le début d’un recul marqué en matière d’émancipation des femmes.

Le salaire des femmes a deux fois plus souffert de la crise sanitaire

Selon un rapport de l’Organisation Internationale du Travail, la crise sanitaire a tout particulièrement fait pression sur les salaires des femmes (De Standaard, 03/12/2020). En Europe, la Belgique est l’un des pays où l’écart entre les genres est le plus important : la perte de salaire due à la pandémie est deux fois plus élevée pour les femmes que pour les hommes, soit 12,7% contre 6,6%. Cela s’explique principalement par la surreprésentation des femmes dans les secteurs durement touchés par la pandémie et les confinements (magasins, horeca, tourisme, etc.), mais aussi par le fait que de nombreuses mères ont dû arrêter temporairement de travailler pour s’occuper de leurs enfants. Cette situation s’aggravera encore lorsque les mesures de soutien aux secteurs touchés cesseront et que le chômage structurel se développera.

Tâches domestiques alourdies, essentiellement pour les femmes

De nouvelles statistiques (ONU-Femmes) apparues en novembre indiquent que la pandémie pourrait effacer 25 ans de progrès en matière d’égalité des genres (BBC News, 26 novembre 2020). Selon Anita Bhatia d’ONU-Femmes, l’accroissement de la charge domestique pose «un risque réel de retour aux stéréotypes sexistes des années 1950». Avant la pandémie, les femmes consacraient trois fois plus de temps que les hommes au travail domestique non rémunéré. «Je vous assure que ce chiffre a plus que doublé», affirme Bhatia. En Belgique également, il semble que le «congé corona», par exemple, soit pris de manière inégale : en septembre, 75% d’entre eux avaient été pris par des femmes (Bruzz, 23/11/2020).

Forte augmentation de la violence à l’égard des femmes

Les chiffres varient mais, partout, le confinement s’est accompagné d’une forte augmentation de la violence et des agressions sexistes. Avant la pandémie, selon l’ONU-Femmes, 18% des femmes dans le monde déclaraient avoir été victimes de violences sexuelles et/ou physiques de la part de leur partenaire au cours de l’année écoulée. Au cours d’une vie, il s’agissait de 30% des femmes. Les chiffres de 2020 démontrent une forte augmentation de toutes les formes de violence : du fait du partenaire mais en rue et en ligne. Avant la crise sanitaire, dans l’Union européenne, une femme de plus de 15 ans sur dix disait avoir été victime de harcèlement en ligne; ce chiffre a également fortement augmenté avec l’explosion du temps que nous passons en ligne.

Aucun retour à l’anormal : luttons pour un meilleur avenir pour nous et nos enfants !

Nous ne disposons pas encore d’un tableau complet de la situation. Les mesures de soutien aux entreprises et aux travailleurs empêchent pour l’instant une forte augmentation du chômage et de la pauvreté. Mais n’ayons aucune illusion : ce gouvernement prend des mesures pour sauver son système – le capitalisme – non pas parce que ces partis sont soudainement préoccupés par nos conditions de vie. Marx a soutenu à juste titre dans Le Capital que le capital est insouciant quant à la santé et à la longévité du travailleur, à moins qu’il ne soit forcé d’en tenir compte par la société. C’est encore plus vrai pour les femmes qui, à chaque crise économique, sont renvoyées au foyer ne fut-ce que partiellement, et donc renvoyées vers la dépendance économique vis-à-vis d’un homme.

La pandémie n’a fait qu’accentuer les difficultés auxquelles les femmes sont confrontées dans ce système. La dépression économique en développement assurera que cela reste le cas. Ce qui est nécessaire, ce ne sont pas des mesures temporaires, mais un changement de système qui empêche les femmes de payer le prix fort de la crise. Voilà notre message central pour le 8 mars : combattre chaque mesure qui tentera de nous faire payer la crise, mais aussi nous organiser au travers de cette lutte pour retirer aux capitalistes le contrôle de la société et de nos vies.

Le 8 mars, passez à l’action avec la Campagne ROSA dans votre école, votre entreprise, votre quartier, avec vos proches… Rejoignez-nous également pour soutenir l’action du personnel soignant, de l’enseignement, de la distribution : ces travailleuses et travailleurs sur lesquels la société a reposé durant cette crise sanitaire. Rejoignez-nous dans la lutte pour un Accord interprofessionnel qui ne permette pas au patronat de répercuter les coûts de la crise sanitaire sur les travailleuses et travailleurs, tout en se sauvant eux-mêmes avec les bénéfices. Aidez-nous à construire une alternative féministe socialiste dans le monde : rejoignez la Campagne ROSA et faites partie de ROSA – International Socialist Feminists!


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