Une nouvelle politique s’impose : Une gauche forte est la meilleure réponse pour la droite

Des millions de Canadiens et Canadiennes se demandent pour qui voter aux élections fédérales. Beaucoup décideront en optant pour la moins mauvaise option. C’est tout le contraire de ce qui se passait il y a quatre ans, lorsqu’il y avait de l’énergie pour mettre Harper à la porte et faire de réels changements. Trudeau a réussi à maîtriser son désir de changement, semblant tout offrir avec audace – réforme électorale, lutte contre les changements climatiques, réduction des inégalités, respect des femmes, droits des Autochtones et plus encore.

Le scandale SNC Lavalin a percé la bulle des libéraux. Ils ne sont pas un parti de principes. Le scandale a révélé la nature sordide des liens du gouvernement avec les grandes entreprises. Ce n’est pas surprenant, mais c’était un paratonnerre pour le sentiment grandissant que Trudeau ne livrait pas ses «chemins ensoleillés», avec beaucoup de promesses brisées ou non tenues. Les libéraux étaient toujours les mêmes, promettant des changements pendant la campagne électorale et gouvernant pour les grandes entreprises.

Le NPD, après avoir mené les sondages d’opinion avant les élections de 2015, n’a pas réussi à inspirer et est tombé à la troisième place, perdant plus de la moitié de ses sièges. Depuis lors, ils ont largement stagné, perdant deux ans avant d’élire un nouveau chef, Jagmeet Singh, qui a attendu encore 17 mois avant de gagner un siège au Parlement. La plupart du temps, le NPD a fait peu d’énoncés de politique fermes et n’a pas organisé de campagnes importantes.

Les conservateurs, avec un chef sans éclat, Scheer, ne se sont pas encore débarrassés du spectre de Harper. Ils n’ont pas de politiques sérieuses pour lutter contre les changements climatiques et se concentrent plutôt sur les réductions d’impôts qui profitent principalement aux riches et entraînent des réductions dans les services publics. Leur co-penseur, Doug Ford, de l’Ontario, démontre ce à quoi ils ressembleraient s’ils étaient au pouvoir. Ils ont assez de squelettes dans leur placard – sur les droits des femmes, l’orientation sexuelle, l’immigration et le racisme – pour remplir un cimetière!

Seuls les Verts suscitent l’enthousiasme. C’est parce qu’ils sont en grande partie non testés et considérés comme radicaux. L’expérience en Colombie-Britannique et à l’échelle internationale est, au bureau, qu’ils ne tiennent pas leurs promesses, même en ce qui concerne l’environnement. Ils ont fait partie de gouvernements de coalition en Europe qui ont procédé à des coupes brutales et soutenu l’extraction du charbon et l’augmentation de la production pétrolière. Ils ne sont pas de fervents défenseurs des droits des travailleurs ou des syndicats.

Le Parti populaire de Bernier fait peu de progrès, même si les partisans de l’intolérance sont de plus en plus nombreux. Cependant, il serait erroné de supposer que le populisme de droite ne va pas croître au Canada, comme en témoignent les récentes élections en Alberta, en Ontario et au Québec.

Cette élection sera marquée par de nombreuses campagnes électorales négatives. Les libéraux désigneront Doug Ford et les squelettes des conservateurs. Les conservateurs continueront de parler de SNC Lavalin et des liens des libéraux avec Bay Street – des critiques justes, mais elles s’appliquent tout autant à eux.

Le NPD aura de la difficulté à faire entendre sa voix, même s’il a les meilleures politiques sur bien des questions. Il a appuyé l’assurance-médicaments pendant des années. Il s’est engagé à mettre fin aux subventions aux combustibles fossiles et à prendre d’autres mesures pour ralentir les changements climatiques. Il propose une modeste augmentation des taxes sur les super-riches et rendra l’enseignement universitaire plus abordable. Toutefois, il a dilapidé sa vague orange québécoise de 2011 et risque de perdre presque tous ses sièges cette fois-ci. De nombreux Canadien et Canadiennes qui appuient les idées du NPD ne sont pas convaincus qu’il peut faire une différence et, depuis des années, ils constatent la piètre performance du parti aux élections et dans les gouvernements. Compte tenu des choix qui s’offrent à nous, nous appuyons le NPD. Cependant, quels que soient les vainqueurs, les principales batailles à venir ne seront pas remportées au Parlement, mais par les mouvements et les syndicats en lutte.

Les perspectives électorales des libéraux sont favorisées par la croissance économique continue, quoique faible. Cependant, derrière les manchettes se cachent des problèmes réels que les politiciens ignorent en grande partie. Les salaires réels ont à peine augmenté en 40 ans, même après dix ans de croissance économique. L’endettement personnel demeure élevé : les ménages doivent 1,78 $ pour chaque dollar de revenu. Près de la moitié des Canadien et Canadiennes sont à 200 $ ou moins de la catastrophe financière. Les loyers dans presque tout le Canada sont inabordables. Un nombre croissant de personnes, en particulier les jeunes, ont des emplois précaires. L’aliénation, l’insécurité, les inquiétudes quant à l’avenir et les problèmes de santé mentale ne cessent de croître.

Crises mondiales

La situation mondiale est presque totalement ignorée lors de l’élection, ou les réponses proposées sont inefficaces. Une récession imminente, rendue plus probable, et probablement pire par la guerre commerciale croissante entre les États-Unis et la Chine, pourrait durement toucher le revenu et les emplois des Canadiens et Canadiennes. Aucune des causes sous-jacentes de la récession de 2008 n’a été résolue – beaucoup de facteurs ont empiré alors que le capitalisme continue à rechercher des profits à court terme. Le Canada est pris au milieu de cette lutte historique entre le déclin des États-Unis et la montée de la Chine pour la domination internationale. L’ordre économique et politique mondial est en train de s’effriter à mesure que les accords internationaux, les traités et les règles du commerce sont mis de côté. L’effondrement du stalinisme a donné à l’impérialisme américain quelques décennies de suprématie mondiale – c’est la fin.

La colère et la frustration augmentent dans le monde entier, car les élites ignorent la réalité de milliards de vies humaines. L’inégalité, inimaginable dans l’histoire, alimente la colère. Dans de nombreux pays, les gouvernements et partis populistes nationalistes de droite se nourrissent de cette colère. C’est particulièrement le cas lorsque la gauche est faible ou timide.

Alors que les nouvelles dominantes sont minées par la morosité et la peur, de nouvelles forces positives se développent. Partout dans le monde, des femmes ont défilé, frappé et protesté pour mettre fin au harcèlement et aux abus sexuels et pour obtenir des droits en matière de reproduction et d’égalité, remportant des victoires comme en Irlande.

Les changements climatiques sont une catastrophe imminente qui met toute vie humaine, animale et végétale en danger. Une coopération et une planification nationales et internationales audacieuses sont nécessaires. Pourtant, presque tous les gouvernements, les entreprises et les partis politiques canadiens agissent comme si seuls des changements mineurs étaient nécessaires. Les changements climatiques façonneront la société et la politique dans les années à venir. Les grèves et les protestations des jeunes contre le climat sont inspirantes. Nombreux sont ceux qui associent clairement le capitalisme à la destruction de l’environnement. Le soutien au socialisme s’accroît aux États-Unis, un changement par rapport à il y a quelques années.

Une gauche forte

Bien que certaines de ces tendances mondiales, tant positives que négatives, ne soient pas aussi prononcées au Canada, le pays n’en sera pas à l’abri. À moins qu’une gauche forte ne soit construite, la droite capturera une partie de la colère et de l’aliénation de la société.

Le NPD est d’avis qu’il peut mieux gérer le capitalisme que les autres partis. Cependant, les crises économiques et les catastrophes écologiques ne sont pas simplement des défaillances de gestion, elles sont enracinées dans le capitalisme. La récession mondiale imminente et les crises écologiques mondiales font que la gestion du capitalisme n’est pas une réponse adéquate.

Il manque un parti de gauche confiant et militant au Canada. Il s’agit d’une excellente occasion, car 58% des Canadiens et Canadiennes ont une opinion positive du socialisme, ce qui indique qu’ils appuieraient fortement un parti qui propose :

– Transition vers les énergies renouvelables, des investissements dans les transports en commun et la modernisation des bâtiments tout en créant de bons emplois;
– Taxer les riches et les grandes entreprises pour réduire les inégalités et pour financer un programme spectaculaire de construction de logements abordables;
– Un salaire minimum de 15 $ à l’échelle du Canada;
– Un système de santé publique complet qui couvre la prescription, les yeux et les dents;
– Un programme national de garderies abordables;
– La reconnaissance des droits des autochtones.

Parallèlement à ces politiques, les Canadiens et Canadiennes ont besoin d’un parti démocratique dont les membres ont un réel contrôle et qui fait campagne toute l’année dans les collectivités, les milieux de travail et les collèges partout au pays.

Les syndicats canadiens demeurent un pouvoir au pays, un pouvoir inutilisé, avec plus de 30% de membres dans la population active. Pendant trop longtemps, la plupart des dirigeant·es syndicaux·ales ont accepté les diktats des patron·nes et n’ont demandé que ce que le capitalisme était prêt à donner – pas grand chose! Les dirigeant·es syndicaux·ales devraient avertir les travailleurs et travailleuses canadiens de ce qui s’en vient et indiquer la voie à suivre. Cela exigera une action déterminée pour défendre les emplois et les salaires et présenter des plans pour un travail utile de remplacement.

Socialist Alternative (Canada)
A New Politics Needed: Strong Left is Best Answer to the Right


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