Pourquoi l’Amazonie est-elle détruite ?

En juillet dernier, une nouvelle très inquiétante a circulé : on estime que depuis le début de l’année, lorsque Jair Bolsonaro a pris en main la présidence du Brésil, l’Amazonie a perdu une superficie forestière égale à un terrain de football par minute. Cette information est maintenant dépassée par une réalité encore plus sombre. Les innombrables incendies qui se sont déclarés au cours des dernières semaines dans la forêt tropicale détruisent des écosystèmes extrêmement importants et aggravent encore l’effroyable déforestation de l’Amazonie.

Le ciel de villes majeures du Brésil et d’autres pays d’Amérique latine s’est noirci de fumées. L’impact de cette catastrophe aura de terribles effets sur l’atmosphère, non seulement à la suite des incendies eux-mêmes, mais également en raison de la destruction d’une forêt qui absorbe de grandes quantités de dioxyde de carbone. Le climat de la région en souffrira, car il dépend de la forêt amazonienne, mais il faut également penser à la perte d’une partie considérable de la biodiversité de la forêt amazonienne, que l’on ne retrouve nulle part ailleurs sur le globe.

Pour comprendre l’ampleur du phénomène, il suffit de savoir que d’après un article de 2017, une nouvelle espèce de flore ou de faune est découverte en Amazonie tous les deux jours. Nous perdons donc aujourd’hui des espèces donc ne connaissons même pas l’existence. Certaines d’entre elles auraient pu être utiles à toute l’humanité pour leurs propriétés curatives. D’autres jouaient peut-être un rôle clé dans l’équilibre de la chaîne alimentaire et leur extinction va peut-être contribuer à celle de nombreuses autres.

Les peuples autochtones

Au-delà des plantes et des animaux, cependant, il y a des êtres humains. Non seulement les habitant·e·s de la planète et les générations futures qui seront touchées indirectement et à long terme par la catastrophe, mais aussi les habitant·e·s de la forêt amazonienne d’aujourd’hui.

Des tribus autochtones persistent à vivre dans la forêt, la protègent et en dépendent pour leur existence. Certaines de ces tribus disparaîtront avec la nature de la région sans que leur existence ne nous ait jamais été connue. D’autres sont connues non seulement pour leur grand patrimoine culturel, mais également pour leurs grandes luttes contre l’épidémie de « croissance » dévastatrice en Amazonie. L’une des figures les plus emblématiques de cette lutte est Chico Mendes, assassiné en 1988 pour avoir tenté d’organiser les peuples autochtones contre la destruction de la forêt qui était leur foyer et leur moyen de survie.

Aujourd’hui, ses assassins — les grandes entreprises agricoles et minières et les gouvernements qui les servent — continuent leur œuvre destructrice en brûlant l’Amazone.

Notre section-soeur brésilienne, LSR, a participé aux actions contre Bolsonaro et le big business

Une forêt géante « dérangeante »

Dans la plupart des cas d’incendies de forêt, il faut être prudent et disposer de preuves concrètes avant de parler d’incendie criminel, voire même spécifiquement planifié. Mais dans le cas de l’Amazonie menacée depuis des décennies et tout particulièrement lorsque d’innombrables incendies éclatent simultanément dans d’innombrables endroits, il est pour le moins naïf de parler de hasard. Après les bulldozers, visiblement trop lents, le big business a fait appel aux incendies.

Mais pourquoi l’Amazonie est-elle détruite ? Que veulent ceux et celles qui s’attaquent au cœur de cette « inutile » forêt ? Dernièrement, les sociétés d’extraction de pétrole et d’or harcèlent de plus en plus les communautés autochtones qui protègent les forêts amazoniennes. Les entreprises agricoles et d’élevage rêvent de convertir encore plus de forêts en cultures et en pâturages. La plus grande partie de la forêt tropicale n’est plus que cela : de nouvelles fermes et de nouveaux champs. Mais de combien de champs a-t-on besoin sur la planète ? Les champs existants ne leur suffisent-ils pas ? Après tout, la destruction de l’Amazonie ne date pas d’aujourd’hui, mais dure depuis de nombreuses décennies.

Des champs à usage unique

Non, les champs ne leur suffisent pas, car le sol de l’Amazone n’est pas fait pour produire du soja. Il convient à la préservation de forêts tropicales séculaires, mais est très pauvre en éléments nutritifs nécessaires à la production agricole.

Ainsi, après un ou deux ans de production, le « champ » devient obsolète. Rapidement, les entreprises agroalimentaires recherchent un autre « champ » dans un autre endroit tout aussi inapproprié de l’Amazonie. Des siècles d’histoire naturelle, des richesses naturelles incalculables, un patrimoine culturel, une biodiversité non cartographiée, des vies humaines sont en train d’être détruites pour une production agricole qui n’a une durée de vie que d’un an ou deux. Cette image résume l’absurdité absolue du système capitaliste.

Un pantin efficace

Si la situation n’était pas si tragique, il y aurait presque de quoi en rire. Le président brésilien a clairement expliqué dès le premier jour de son accession au pouvoir que la forêt amazonienne est un obstacle pour les grandes entreprises. Et sa principale vocation est de servir les intérêts de ces dernières. Selon lui, ce sont les organisations environnementales actives dans la région qui sont responsables des incendies alors qu’il a livré l’Amazonie aux grands intérêts commerciaux qui déterminent le destin de la planète !

Ces entreprises mettent en jeu la survie de la nature et des êtres humains. Cette absurdité n’a qu’une issue. Nous la renverserons ou elle nous détruira.

Electra Klitsa, Xekinima (Grèce)


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